[portrait] Brian Hoyer, le Hometown Hero

Vouloir être footballeur professionnel et absolument jouer pour les Cleveland Browns? Soit l’on possède un côté sado-masochiste (et pourquoi pas lorsque l’on se prend à longueur d’années des sacks de...

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Vouloir être footballeur professionnel et absolument jouer pour les Cleveland Browns? Soit l’on possède un côté sado-masochiste (et pourquoi pas lorsque l’on se prend à longueur d’années des sacks de la part de joueurs de plus de 120 kilos) ou, plus simplement, on est originaire de cette ville et l’on se doit de défendre les couleurs du club que l’on supporte depuis tout gamin. C’est cette deuxième option qui a amené Brian Hoyer (on n’a pas plus d’informations sur la première…) à revêtir le maillot des lovable losers que sont devenus les Browns lors des 20 dernières années. Mais son parcours n’a pas été si rectiligne. Loin de là…

La vie de Brian

Malgré la hype autour de Johnny Manziel, Brian Hoyer a été capable de s'approprier le poste de quarterback titulaire cette saison.

Malgré la hype autour de Johnny Manziel (#2), Brian Hoyer (#6) a été capable de s’approprier le poste de quarterback titulaire cette saison.

Berea, au Sud-Ouest de Cleveland. C’est ici que, tous les ans, les Cleveland Browns commencent leur saison par leur camp d’entrainement. A deux jets de pierre de là, à 10 kms au Nord pour les plus géographes, c’est à North Olmsted que l’histoire d’amour a commencé entre les Browns et Brian Hoyer. Sa famille possédant des abonnements pour les deux franchises les plus importantes de la ville, les Browns et les Indians (baseball), son éducation sportive se fait dans les gradins battus par la pluie, le froid… et les défaites qui font mal. Trop jeune pour avoir connu « The Drive », il a 10 ans lorsqu’Art Moddell, le propriétaire de la franchise, décide de déménager pour Baltimore, un coup encore bien plus terrible pour la ville dont le surnom de « Mistake by the Lake » (l’erreur sur le lac) semble prendre tout son sens en cette année 1995. Brian Hoyer, lui, combat ce gène local de la « lositude » (© Ségolene Royal). Dans son équipe de collège des White Eagles de North Olmsted, il finit invaincu et dédicace un ballon pour son coach d’alors, Karl Kubb, ballon qui trône depuis maintenant une vingtaine d’années dans le salon de ce dernier.

« J’ai toujours été fan de Brian Hoyer mais pour la manière dont il se comporte et la façon dont il traite les gens de cette communauté. Il fait tout bien, sans même parler du football. » Karl Kubb, coach de Brian Hoyer lorsqu’il avait 11 ans.

C’est en devenant le quarterback de St Ignatius, un lycée situé dans le centre-ville de Cleveland, que Brian Hoyer acquiert une petite réputation de star locale, aussi doué pour lancer des ballons de foot que pour pitcher des balles de baseball. Avec un bilan de 8 victoires en 9 matches lors de sa saison, il mène même son équipe de baseball au titre de l’Etat en Division I. Sur les terrains de foot, il n’est pas en reste et participe au All Star Game lycéen de l’Ohio en 2004, son année senior, tout en étant classé dans les 20 meilleurs quarterbacks « de style pro » de son âge aux Etats-Unis.
Pourtant, ce fils de l’Ohio va continuer sa carrière dans l’Etat rival du Michigan, chez les Spartans de Michigan State University…

NFL Connection, time time for some action !
A Lansing, sa première année le voit être « redshirté » (c’est à dire que son année ne compte pas dans les quatre que peut effectuer, au maximum, un joueur universitaire) alors qu’en 2005, c’est avec un autre futur quarterback NFL, Drew Stanton, qu’il partage le temps de jeu. Et c’est à partir de son année junior en 2007 qu’Hoyer prend véritablement son envol. Le changement ? L’arrivée de Mark Dantonio comme coach des Spartans, avec sa philosophie plus traditionnelle en attaque, réduisant la spread offense à la portion congrue pour plutôt s’appuyer sur un running-back comme Javon Ringer, capable d’amasser plus de 1400 yards en 13 rencontres. Hoyer, lui, lance 20 touchdowns et pour plus de 2700 yards dans le même temps, gardant ainsi un quarterback comme Nick Foles sur le banc. Un Nick Foles qui préfèrera retourner sous le soleil, en Arizona, plutôt que de végéter une année de plus dans l’ombre d’Hoyer. Et, lors de l’année senior d’Hoyer, c’est encore un autre futur pro en la personne de Kirk Cousins qui devra patienter derrière le #7, avant de se voir attribuer le poste les 3 saisons suivantes et de devenir le quarterback le plus productif de l’histoire de MSU.

« C’est le genre de gars qui a toujours soif d’apprendre. Il sait qu’il doit faire ses preuves » Dave Warner, le coach des quarterbacks à Michigan State

Mais si la capacité de Brian Hoyer à garder sa place face à de tels talents, tous parvenus un jour à être considérés comme des titulaires en puissance en NFL, donne de sérieuses indications sur son éthique de travail et sa compétitivité, sa dernière année universitaire le voit aussi produire des chiffres moindres et ne pas démontrer la progression que toutes les franchises NFL attendent d’un quarterback arrivé au bout de son cursus. Son taux de réussite, passé de 59 à 51%, est inquiétant tandis que son nombre de touchdowns tombe lui aussi de moitié (20 à 9), même si ses receveurs laissent tomber de nombreux ballons et influent fortement sur ces chiffres.

Néanmoins, son physique (1m88 pour 98 kilos), son talent pour contrôler le tempo d’un match, sa vitesse pour lâcher la balle et ses qualités dans la poche de protection en font un prospect NFL intéressant qui devrait pouvoir trouver une place dans cette draft 2009 où des légendes telles que Keith Null, Mike Teel ou Curtis Painter seront sélectionnées lors des derniers tours…

Hoyer, Hoyer, Braves gens !
Pourtant, 256 noms plus tard, celui de Brian Hoyer n’a pas été prononcé sur la scène du Radio City Hall à New York, en faisant officiellement un free-agent libre de choisir la franchise où il tentera de gagner sa place en NFL. Et depuis les années 2000, quelle meilleure équipe que les New England Patriots pour apprendre son métier auprès d’un futur Hall of Famer, Tom Brady ? Ce dernier, ex-Wolverine de l’Université de Michigan, dira d’ailleurs de Hoyer, sur le ton de la plaisanterie, qu’ « il n’est pas trop mauvais pour un ancien de Michigan State ». Il faut dire que la qualité du Spartan de Michigan State est telle que Bill Belichick décide de libérer les trois autres quarterbacks et d’en faire le seul remplaçant de Brady. Alors que Matt Cassell a dû remplacer Brady pour toute la saison 2008 au bout de moins d’une mi-temps de jeu, une sacré marque de confiance de la part de la plus efficace des franchises de ces quinze dernières années…

« Il a été d’une aide énorme pour mon développement, rien qu’en le regardant, en lui posant des questions et en apprenant de lui. Il m’a vraiment aidé sans avoir vraiment besoin de faire quelque chose. Il a été un super coéquipier et un bon mentor. » Brian Hoyer à propos de Tom Brady

Revers de la médaille d’appartenir à une telle organisation, le temps de jeu de Brian Hoyer est limité aux matches de pré-saison, ceux qui ne comptent pas vraiment. Seul répit, les matches que les Patriots dominent tellement que le remplaçant peut y rentrer sans que l’équipe ne risque grand chose. Et alors que Ryan Mallett vient d’arriver dans l’effectif en 2011, c’est Hoyer qui, lors du dernier match de la saison face aux Bills, lance la passe permettant à Rob Gronkowski de battre le record de yards pour un tight-end sur une saison. L’arrivée d’un concurrent tel que Mallett sonne pourtant le glas du séjour de Brian Hoyer à Boston qui commence alors son parcours de journeyman de la NFL. Coupé par les Patriots en août 2012, il signe chez les Steelers avant d’en être coupé, là aussi, après une petite semaine. Réclamé par les Cardinals par le système de waivers, il trouve dans l’Arizona un nouveau foyer où il débutera enfin son premier match NFL, contre les 49ers à San Francisco. Mais quand, en mai 2013, les Cardinals décident eux-aussi de mettre un terme à son contrat, c’est l’opportunité d’une vie qui se présente à Brian Hoyer : le poste de quarterback chez les Cleveland Browns, l’équipe de son enfance.

Devenu titulaire par la « grâce » du début de saison abyssal de Brandon Weeden à ce poste (1 touchdown pour 3 interceptions en 2 matches et…2 défaites), il prend les rênes de l’équipe contre Minnesota où, malgré 3 interceptions, son sens du jeu (3 touchdowns) fait renaître les Browns de leurs cendres. L’équipe de Cleveland étant l’une des plus maudites de la ligue, Hoyer se blesse gravement au genou lors de son 3e match, face à Buffalo. Alors que les Browns finissent la saison sur 10 défaites en 11 matches, la draft de Johnny Manziel en 22e position semble, une fois encore, être le signal que Brian Hoyer ne passera pas le cut et devra se trouver un nouveau lieu de villégiature. C’est sans compter l’arrivée inattendue de Mike Pettine au poste de coach. Partant d’un constat objectif, le nouveau venu trouve le vétéran beaucoup plus à même que « Johnny Football » de mener les Browns à la victoire, malgré toute la hype entourant le rookie.
A coups de play-action bien éxécutés, de receveurs renaissants et d’une ligne offensive toujours aussi performante malgré la perte du Pro-Bowler Alex Mack, Brian Hoyer emmène les Browns à la premiere place de l’AFC North après 9 journees et en position de se qualifier pour les playoffs pour la première fois depuis 2002.
Vu l’histoire tourmentée de cette franchise historique de la ligue, on serait prêt à parier que Brian Hoyer serait alors un sérieux concurrent pour Lebron James au titre de Hometown Hero, le héros de l’équipe de sa propre ville. Un sacre accomplissement pour un petit gars au parcours bien moins royal que celui du King de la NBA…

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