[portrait] Odell Beckham Jr, le freak génétique

Le gouvernement chinois avait approuvé et validé l’experience. En prenant deux athlètes de grande taille et au patrimoine génétique prometteur, ils créeraient le basketteur parfait et en feraient la première superstar...

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Le gouvernement chinois avait approuvé et validé l’experience. En prenant deux athlètes de grande taille et au patrimoine génétique prometteur, ils créeraient le basketteur parfait et en feraient la première superstar chinoise de ce sport. Yao Ming, l’ancien pivot des Houston Rockets, né en 1980, fut donc celui-là et, sans ses blessures, aurait sûrement eu encore plus d’impact sur l’histoire sportive chinoise, américaine et mondiale.
Sur le campus de LSU en 1992, point d’expérience ni d’eugénisme mais une histoire d’amour entre le running-back titulaire de l’équipe de football, Odell Beckham Sr, et l’une des meilleures sprinteuses américaines de l’époque, Heather Van Norman. A la loterie de la génétique, le monde du football y gagnera un « Freak », Odell Beckham Jr, peut-etre déjà le meilleur receveur de NFL alors qu’il finit tout juste sa saison rookie. Le terme superstar ne devrait pas attendre avant de lui être collé dessus…

Run it like Beckham

Forcément, LA reception de l'année en NFL

Forcément, LA reception de l’année en NFL

C’est donc la collision de deux talents qui aura donné naissance à la pépite qui, sous le maillot #13 des New York Giants a déjà accumulé plus de réceptions que n’importe quel autre rookie dans l’histoire de la franchise. Il en aura accumulé 79 avant cette semaine 17, battant les 74 de Jeremy Shockey en 2002, et se placera en 2e position All-Time, derrière Steve Smith, avec 8 nouvelles réceptions face aux Eagles ce dimanche.

Il a soif d’apprendre et il veut continuer à s’améliorer. Je pense qu’il le fera et que, dans le futur, en même temps qu’il comprendra mieux le jeu professionnel, il comprendra également que certaines choses qu’il fait envoient un mauvais message ou même un message erroné » Tom Coughlin

Si Odell Beckham Jr est bien un enfant de la Louisiane, né à La Nouvelle-Orléans et élevé dans le Bayou, ses racines familiales remontent jusque dans le Minnesota. C’est là-bas, dans le Gopher State, que sa mère, Heather, fut adoptée par le couple Van Norman en 1970 et y est devenue une légende athlétique lycéenne. Entre 1985 et 1988, elle gagne les titres de l’Etat sur le 100, 200 et 400m et reste invaincue pendant les 147 dernières courses de sa carrière. Son père dira même que, si elle avait dû accrocher à sa veste toutes les médailles remportées, celle-ci serait devenue blindée. Evidemment, avec Minneapolis et l’Université du Minnesota à moins de 200km de Windom, une bourgade de 4000 habitants, la jeune athlète décide de suivre les préférences de son père et de continuer sa carrière dans l’Etat qui l’a vue grandir. Néanmoins, la rigueur du climat du Nord lui posent des problèmes pour accomplir son rêve : être sélectionné pour les Jeux Olympiques de Barcelone en 1992. Après une seule année à UM, elle rejoint donc Louisiana State University et son équipe d’athlétisme légendaire, qu’elle aidera à conquérir trois titres universitaires de suite, en plein air, et deux en « indoor », un palmarès parmi les meilleurs de l’histoire de l’athlétisme universitaire américain. Individuellement, elle sera également nommée All-American six fois. Pour les Jeux Olympiques, par contre, son rêve s’éteindra en même temps que son ventre gonflera et verra le jeune Odell s’y développer pour finalement naître en novembre 1992, alors que les Sélections US avaient lieu en juin à La Nouvelle-Orleans et qu’elle ne put donc y participer dans des conditions correctes.

« C’est irréel, incroyable. Je regarderai les matches d’Odell Jr en vidéo plus tard. C’est un don de Dieu, une bénédiction. Je ne peux pas le souligner assez. C’est au-delà de tout ce que j’aurais pu imaginer » Heather Van Norman, la mère d’Odell Beckham Jr.

C’est que, sur le campus, sa longue foulée longiligne n’était pas passée inaperçue aux yeux d’Odell Beckham Sr, comparant l’athlète à un « quarterhorse », ces chevaux puissants, racés et au port de tête fier dont le nom évoque la superbe vitesse sur 400m. Arrivé en provenance du lycée de Marshall, dans le Texas, Beckham Sr est, lui, le running-back de LSU, après avoir refusé des offres d’Oklahoma State, de Texas ou d’Alabama. Qualifié d’athlète d’exception par HG Bissinger dans son livre « Friday Night Lights », alors que les Permian Panthers affrontent Marshall, sa carrière universitaire ne sera pas aussi fructueuse qu’elle aurait pu l’être. Le renvoi du coach l’ayant recruté le forcera à migrer de half-back a fullback, tandis que des dépôts de calcium dans son genou mettront un terme à ses rêves de NFL. Après une courte carrière en Arena League, et son diplôme en poche, il repartira pour le Texas, à Houston puis à Dallas, non sans procurer à son fils Odell un parrain d’exception en la personne de Shaquille O’Neal, son compagnon de chambrée sur le campus. Ce même Shaq qui, fan des Cowboys, déclarera publiquement supporter maintenant les Giants une fois drafté Beckham Jr en 13e position lors de la foire aux talents millésimée 2014.

Si Odell Beckham Sr est donc bien le père biologique de Beckham Jr, c’est néanmoins Derek Mills, médaillé d’or olympique sur 4x400m aux Jeux Olympiques d’Atlanta en 1996 et mari de Heather depuis 1997, qui se chargera de l’éducation paternelle quotidienne du petit Odell depuis l’âge de 5 ans qui l’appelle «beau-père» sans aucun problème.

LSU plutôt que The U 
La séparation entre les Odell et Heather s’étant faite dans la cordialité, Odell Beckham Sr reste dans la vie de son fils, ce dernier passant tous les étés chez lui. En 2008, c’est ce même fils qui lui demande de le rejoindre en Louisiane, à la Nouvelle-Orléans, pour « rendre sa vie complète » et avoir près de lui tous les êtres chers à son coeur, le tout avec la bénédiction de sa mère qui voit le retour du père auprès de son fils comme « une bénédiction et un modèle positif à suivre ». Surtout, le père aura l’instinct sportif de conseiller à son fils de signer avec les Tigers de LSU en 2010, plutôt que de rejoindre des programmes pourtant alléchants, comme Miami ou Oregon, mais peut-être moins stables à court terme. Le départ de Chip Kelly vers les Eagles en 2013 et le renvoi de Randy Shannon de The U en 2010 lui auront donné raison.

« Je me suis assuré qu’il ait de bonnes manières et qu’il comprenne qu’il est un « role-model », même s’il n’a rien demandé. Signe tous les autographes, en particulier pour les enfants, parce que cela représente quelque chose d’important pour eux. Sois humble. Sois une bonne personne » Odell Beckham Sr

Avec Beckham Jr, Les Miles, le coach bien en place de LSU, récupère un phénomène au poste de receveur mais également un excellent retourneur de punt, dans la plus grande tradition du « Honey Badger », Tyran Mathieu. Si ses deux premières saisons sous les couleurs des Tigers sont statistiquement peu décisives (4 touchdowns au total pour 1200 yards), il est tout de même l’un des « go-to guys » de Zach Mettenberger, le quarterback. Si Rueben Randle, en 2011, et Jarvis Landry, en 2012, le dépassent au nombre de réceptions, ses 14,4 yards en moyenne sur chacune d’entre-elles sont une belle entrée en matiere.

Mais si, en 2013, c’est encore une fois Jarvis Landry, son « frère », qui domine les classements de l’équipe en terme de receptions, de touchdowns et de yards, Beckham Jr explose ses statistiques personnelles, parvenant à rallier la end-zone 8 fois sur des passes de Mettenberger et 2 autres fois sur des retours de punt. Il propose aux fans amassés dans le Tiger Stadium quelques highlights où l’on peut déjà découvrir ce qui fera le succès de son jeu fluide à l’échelon supérieur, avec sa capacité à recevoir des ballons dans toutes les positions et à toutes les hauteurs mais également à se démarquer des cornerbacks adverses en utilisant des trajectoires aigües sur ses courses. Ses doigts immenses, « de la taille de ceux d’ET » selon son coach d’équipes spéciales Thomas Mc Gaughey à LSU, lui permettent déjà de capter des ballons à une main aussi facilement que le commun des mortels attrape une gastro en hiver…

« The Catch »
Pourtant, malgré ce patrimoine génétique assez hors du commun et cette formation, les critiques pré-draft parlent de sa vitesse de course qui n’est pas « élite » ou de sa taille (1m80) qui s’éloigne des standards actuels à cette position en NFL. Buffalo, en 4e position, et Tampa Bay, en 7e, préfèrent passer leurs tours et miser sur Sammy Watkins et Mike Evans. Objectivement, il est difficile de leur reprocher leurs choix vu la saison réussie des deux rookies. Les New York Giants sautent, eux, sur l’occasion de prendre ce receveur ultra-talentueux dont le physique se rapproche de Victor Cruz, leur receveur à 43 millions de dollars.

Mais si sa sélection est accueillie avec bonheur par les fans de New York (et ce n’est pas souvent le cas…), sa mise en route en NFL est poussive. Après avoir joué les 40 matches de sa carrière universitaire sans blessure, son inter-saison est un mélange de blessures et d’incompréhension avec le staff, le tout culminant avec un fameux « Il n’est pas prêt pour jouer ! » de Tom Coughlin alors que la saison débute quelques jours plus tard. Le soutien psychologique de son père, qui est même allé jusqu’à conduire pendant 19h pour lui apporter son chien Tzar, des enchiladas et un plat mijoté au poulet, n’est pas de trop pour surmonter ces débuts chaotiques dans la Grosse Pomme.
Finalement, la conjonction de la grave blessure de Victor Cruz, qui ouvre le poste de premier receveur, avec une rééducation bien exécutée et des exercices de stretching conseillés par Rashard Jennings, marque la réelle arrivée de Beckham Jr dans l’imaginaire collectif des fans des Giants. OBJ, comme on le surnomme, retrouve la plénitude de ses moyens, sa « Whip Dance » de célébration de touchdowns et récolte le prix de « Rookie Offensif du Mois » en novembre, après y avoir accumulé 593 yards sur ses 5 matches. Et surtout, ce que tout le monde du sport américain qualifie de « The Catch » dès lors que Beckham Jr capte ce ballon face à Brandon Carr lors du Sunday Night Football face aux Cowboys, reléguant presque celle de Dwight Clark aux oubliettes. Avec cette prise exceptionnelle, Beckham Jr passe au rang de star célébrée par Michael Jordan ou Lebron James.

Forcément, avec un nom pareil, on pourrait alors se dire que son maillot se vend comme des petits pains mais c’est là l’un des paradoxes de cette saison pour lui. Si Odell Beckham Jr est sur la short-list pour être élu « Offensive Rookie of the Year », en plus de son statut de remplaçant pour le Pro Bowl, son maillot n’était encore que le 7e le plus vendu parmi ceux des Rookies au 14 décembre dans les enseignes Dick Sporting Goods, pourtant bien implantées dans tout le pays. Entre star et superstar, c’est un petit signe qu’Odell Beckham Jr a encore une marge à combler. A lui d’y travailler !

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