[Portrait] Gerald McCoy, le gentil géant

Sourire pour mieux déstabiliser, les plus féroces compétiteurs du sport américain ont toujours su utiliser au mieux cette arme. Les Detroit Pistons des années 80 notamment l’ont érigé au rang...

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Sourire pour mieux déstabiliser, les plus féroces compétiteurs du sport américain ont toujours su utiliser au mieux cette arme. Les Detroit Pistons des années 80 notamment l’ont érigé au rang d’art, leur permettant alors de mettre à l’amende pendant de nombreuses années le meilleur athlète du monde, Michael Jordan. Chez d’autres, comme Gerald McCoy, point de malice dans cette démonstration, juste le signe d’une personnalité hors du commun, capable de jouer avec férocité tout en restant un gentleman sur le terrain. Pourtant, un événement aurait pu gommer ce sourire à jamais…

Gone too Soon(er)
Fête des Pères 2007. Les McCoy se réunissent dans la maison familiale d’Oklahoma City. Gerald vient de finir sa première année à l’Université d’Oklahoma, un choix évident pour le fils d’un couple de fans des
Sooners. Avec son statut « Redshirt », il a passé la saison à s’entrainer avec ses coéquipiers sans mettre les pieds sur le terrain, malgré la pression populaire voyant déjà en lui un defensive tackle d’impact. Alors, cette fête de famille, à deux mois de la reprise de l’entrainement, est un peu particulière pour lui car il sent bien que ce sera la dernière avant que sa vie ne change totalement, que son destin ne bascule en faisant de lui un véritable Sooner, une machine à dessouder les quarterbacks adverses.

« Elle a été celle qui m’a appris à être un leader et non pas un suiveur, d’être en tête et pas en queue. Quand je voulais arrêter lors de ma première année à Oklahoma, elle m’a dit « On n’abandonne pas dans cette famille. Si tu le fais, je te tue » Gerald McCoy sur sa mère

Gerald, ses deux sœurs et leur père, Gerald Sr, accueillent Patricia, leur mère , de retour d’un voyage d’affaires à San Antonio, elle qui travaille alors dans les Ressources Humaines sur cette grande base militaire. La journée se passe dans la bonne humeur et les rires font vivre la maison, comme souvent, mais les maux de tête répétés et extrêmement douloureux de Patricia tout au long de celle-ci font peser une atmosphère un peu lourde et inquiète. Un malaise plus tard, voila la mère de Gerald McCoy se retrouvant aux urgences en ce jour de fêtes. Le verdict tombe alors : rupture d’anévrisme. Les médecins parviennent tout de même à stabiliser son état et à la garder en vie, mais la garde en observation. Rassuré, Gerald peut retourner se préparer à aller affronter les lignes offensives mastodontes de la conférence Big 12. Deux semaines plus tard, un appel de son père, è la sortie de son entrainement physique individuel, l’informe que sa mère vient de décéder d’un arrêt cardiaque à l’âge de 53 ans. Gerald McCoy pensait bien que sa vie allait être bouleversée mais jamais à ce point…

Une draft historique
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L’impact dévastateur de la perte de sa mère ne fait que décupler la motivation du jeune homme pour entrer de plain pied dans l’histoire de OU, une université à l’histoire pourtant déjà très riche. Néanmoins, à deux jours de son premier match sous le maillot cramoisi des Sooners, il craque sur l’épaule de son père et se lamente que sa mère ne puisse jamais le voir jouer au foot pour l’Université dont elle était si entichée. « 
On ne s’en remet jamais, on ne fait que s’y habituer» philosophe-t-il à propos de cette absence.

Pourtant, malgré son chagrin, le #93 ne se déparie jamais de son sourire au cours de ses trois années universitaires, ni de ses cinq années pros. Mais, alors que les Bucs le draftent en 3e position de la Draft 2010, et avec les initiales de sa mère brodées sur son costume, ce sont bien des larmes de joie et de peine qui y sont mêlées alors qu’il s’en va « hugger » le Commissioner Goodell sur la scène du Radio City Music Hall, une première dans l’histoire de l’événement. « Je viens de l’Oklahoma et, chez moi dans l’Oklahoma, on hugge » explique-t-il après coup.

Si l’émotion qui l’étreint est l’une des images de la soirée (en plus du fameux hug), la valeur sportive de Gerald McCoy a déjà fait le tour des analystes et des équipes NFL. Elu All-American à l’unanimité lors de sa troisième et dernière année universitaire, il est le partenaire idéal de Sam Bradford et Trent Williams, choisis en 1ère et 4e position de cette même draft 2010. Avec de tels talents, les Sooners atteignent d’ailleurs en fin de saison 2008 la finale universitaire du BCS mais doivent s’y incliner face aux Florida Gators de Tim Tebow.

Un travail de Sapp
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Avec son histoire, son éducation et sa maturité, due à une première paternité arrivée dès l’age de 17 ans alors qu’il n’était encore que
senior au lycée, le joueur des Bucs semble faire l’unanimité. Son potentiel physique monstrueux (1m93 pour 135 kilos) convient parfaitement au système defensif en 4-3 de l’équipe floridienne. Les dirigeants pensent enfin tenir un successeur à la legende Warren Sapp, à la retraite depuis 2007, qui prend le rookie sous son aile en lui expliquant l’histoire de sa position, l’importance de l’équipe pour la ville de Tampa et lui inculque une devise : « Quoiqu’il se passe avec ta carrière, tu en retireras ce que tu as mis dedans ». Pourtant, un élément tracasse toujours quelques observateurs, ses coaches ainsi que son mentor Sapp. Le voir aider à se relever des adversaires qu’il met toute son énergie à bousculer et à plaquer fait douter de sa capacité à accéder au plus haut niveau, un sommet qui requerrait donc une méchanceté vis-a-vis de ses adversaires.

« Le voir se pencher et aider le running-back et l’offensive lineman à se relever, j’en ai presque vomi. On ne peut pas faire ça, on ne peut pas faire ça. On joue à ce jeu avec une certaine mentalité » Warren Sapp

C’est que, malgré son physique hors norme, Gerald McCoy est resté un grand enfant, capable de se grimer en vieil homme dans un magasin d’Orlando pour les besoins d’une vidéo ou d’être un fan déclaré de comic books, qui considère Hulk et Wolverine commes ses héros personnels. Relever ses adversaires une fois le jeu terminé ? « C’est ce que je suis et ce que je vais continuer à être. Si ca vous derange, vous allez devoir vous y habituer. Je vais continuer à aider les gars à se relever parce que je suis un gars fair-play et parce que le foot, c’est temporaire. Le sport, c’est temporaire ». C’est ainsi qu’il s’explique dans les colonnes de Sports Illustrated en décembre 2014

The Real McCoy
Et l’on ne peut pas dire que cette philosophie l’ait vraiment empêché de réaliser de grandes choses sous le maillot des Bucs. Depuis son arrivée dans la ligue, il a déjà été sélectionné trois fois pour le Pro Bowl, a effectué 27 sacks (8e dans l’histoire des Bucs), et était le meilleur Defensive tackle de la ligue selon les calculs de Pro Football Focus en 2013. Si son grand concurrent à ce poste, Ndamukong Suh, sélectionné en 2e position de cette draft 2010 par les Lions, l’a maintenant rejoint en Floride chez les voisins des Dolphins et a signé cet été le plus gros contrat jamais donné à un defenseur (114 millions sur 6 ans), Gerald McCoy n’est pas en reste question finances en ayant lui même reçu une extension de contrat de 7 ans pour 98 millions de dollars en octobre 2014. Mais si McCoy dit de son rival Suh que sa carrière et son palmarès individuel en font le numéro 1 évident au poste, d’autres pourraient en dire autant de lui, d’autant que les écarts anti-sportifs de l’ex-Lion se sont accumulés ces dernières années. La combinaison de son talent, de ses capacités et de sa personnalité font bien de Gerald un gentil parmi les géants tout en restant « 
the real McCoy », un vrai de vrai. Une expression américaine qui n’aura jamais aussi bien porté son nom, semble-t-il…

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