[histoire] LaDainian Tomlinson : The Flash

La vitesse de Barry Allen. La virtuosité de Barry Sanders. S’il ne partage pas leur prénom, LaDainian Tomlinson tient de l’un sa vitesse électrisante et de l’autre, son implacable explosivité....

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La vitesse de Barry Allen. La virtuosité de Barry Sanders. S’il ne partage pas leur prénom, LaDainian Tomlinson tient de l’un sa vitesse électrisante et de l’autre, son implacable explosivité. Comme habité d’une électricité qui transcende tous les muscles de son corps, L.T. est une véritable boule d’énergie. Une pile électrique. Mettez-lui le ballon dans les mains, et c’est l’explosion électromagnétique. He’s a lightning bolt. He’s the Flash.

I am the fastest man alive (or kind of)

Il a neuf ans. Il vient tout juste de rejoindre le réseau des Pop Warner Little Scholars. Un programme qui allie résultats scolaires et performances sportives. Vous voulez vous  défouler comme un petit fou sur un terrain, vous avez intérêt à casquer en classe sous peine d’être privé de récré. Sur son tout premier ballon, il fait ce qu’il sait faire de mieux : marquer. LaDainian Tomlinson vient de se trouver une identité. Mais il ne le sait pas encore. Quand il rejoint le lycée University de Waco, dans son Texas natal, il joue les sportifs touche à tout. Basket, baseball, football, athlé. Tout prétexte est bon pour cavaler. Encore. Encore. Et encore. S’il débute dans le rôle du chasseur, celui de linebacker, c’est dans celui de proie, de coureur, que L.T. s’épanouit. Fan absolu des Dallas Cowboys et Miami Hurricanes, il voue un véritable culte à Walter Payton et érige Barry Sanders, Emmitt Smith et Jim Brown en idoles. En dernière année, en 1997, il rafle les récompenses en pagaille. Les yards, il les engloutis comme un glouton : 2554 unités et 39 touchdowns. Le chemin de la endzone n’a plus de secret pour lui.

Quand TCU lui fait les yeux doux, il n’hésite pas longtemps. Il plie bagage et prend la route. 140 km plus tard, il découvre le campus des Horned Frogs, à Fort Worth. Avec seulement deux Bowls en 34 ans, la formation texane ne fait pas trembler grand monde. Encore moins depuis sa rétrogradation dans la WAC. Associé à Basil Mitchell lors de ses deux premières années, il aide TCU à retrouver le parfum du succès. Une odeur oubliée depuis bien longtemps de ce côté du Lone Star State. En 1998, les Violets décrochent leur premier succès dans un Bowl en 41 ans en disposant des USC Trojans lors du Sun Bowl. En 1999, il écrabouille à lui seul les pauvres Miners de UTEP : 406 yards. Il faudra attendre Melvin Gordon (409), puis Samaje Perine (427) la saison passée pour voir cette marque disparaître des tablettes. 1850 yards et 18 touchdowns plus tard, il conclut sa première campagne de titulaire en tête des coureurs universitaires.

Un statut qui visiblement lui plaît et qu’il va conserver pour sa dernière année d’insouciance. 2158 yards, 22 touchdowns, une étiquette unanime de All-Pro placardée sur le casque, le Doak Walker Award remis au meilleur running back du pays sous le bras et une place au pied du podium dans la course au Heisman Trophy, L.T. quitte TCU avec un CV long comme le bras. Il portait le numéro 5 dans le Texas, c’est le nombre de choix qu’il devra attendre pour entendre son nom raisonner le jour de la Draft 2001. Les Chargers cèdent leur premier choix général aux Falcons, les laissent drafter Michael Vick, puis mettent la main sur leur franchise running back quatre choix plus tard. Un joli tour de passe-passe.

All he does is scoring touchdowns

Dans les airs, au sol, à la fin de la passe au début. L.T. n’aura de cesse de marquer. Il a à peine posé un pied à San Diego qu’il est déjà titulaire. Au sein d’une équipe qui n’a rien d’un foudre de guerre en 2001 (5-10), la pile électrique Tomlinson se débrouille pour enquiller 1236 yards et scorer 10 fois. Un tour de chauffe. L’année suivante, il flirte avec les 1700 unités et continue de trouver le chemin de la peinture aussi aisément. Puis vient 2003 et son premier exploit XXL. Pour la toute première fois dans l’histoire de la ligue, un joueur court plus de 1000 yards et attrape 100 passes. Au total, ce sont 2370 yards que LaDainian engloutit. En hommage au #21 floqué dans son dos, il foule la peinture à 21 reprises. En à peine 4 saisons et 6o matchs il atteint le seuil des 5o touchdowns. Il en profite pour égaler le record de rencontres consécutives avec un touchdown de Lenny Moore en ajoutant son nom à la feuille de score 18 matchs de suite. Son instinct pour la endzone lui doit des invitations répétées à la fiesta de fin d’année d’Honolulu.

Le 16 octobre 2005 face aux Raiders, il devient le 7e joueur dans l’histoire de la NFL à courir, attraper et lancer un touchdown dans une même partie. Car non content d’être un coureur indomptable et un receveur doué, ce cher L.T. n’est pas maladroit au petit jeu du lancer de ballon. Pas du tout même. En atteste son rating de 154,4. Des 8 passes qu’il a complétées au cours de sa carrière, 7 ont atterri dans la peinture. Plus de 1800 yards cumulés et 20 touchdowns dans les airs ou sur la terre ferme, la centrifugeuse Tomlinson grimpe en régime. Irrémédiablement. Même avec plusieurs côtes brisées en fin de saison, il continue à jouer. Petit, mais costaud. Sky is the limit. Mais L.T. a-t-il vraiment une limite ? Rien n’est moins sûr.

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L.T. > Pikachu

L’année suivante, il lance l’attaque fatale-foudre sur toute la ligue. 14 touchdowns en 4 matchs. Un premier record NFL. Tomlinson est aimanté par la endzone. Puis 16 touchdowns en 5 parties. Nouveau record. Puis 19 touchdowns en 6 rencontres. Énième record. LaDainian est électrisant comme jamais. Électrocutant. Électrocutant. Chick-chack. Il laisse les défenseurs sur leur postérieur à coup d’appuis incisifs, de spin moves imprévisibles, de changements de rythme et de direction décontenançant, d’accélérations foudroyantes. Son centre de gravité bas le rend implacable et plus dynamique de jamais. Il semble ne jamais pouvoir tomber. Même lorsque ses fesses effleurent le gazon, il parvient à rebondir, se faufiler, puis s’enfuir. Un cauchemar pour les uns, un régal pour les autres.

Face aux 49ers, Bengals et Broncos, il s’offrent des quadruplés. Quatre semaines consécutives, il signera des triplés. Une première dans l’histoire de la ligue. Boulimique de touchdowns, il devient le joueur le plus rapide à atteindre le cap des 100 touchdowns. Plus rapide que Jim Brown et Emmitt Smith. Tiens, tiens ses modèles d’enfance. Pour son 13e match, il signe un 29e touchdown et bat le record que le tank Shaun Alexander avait mis 16 rencontres à établir. Le 17 décembre à Kansas City, et accessoirement 47 ans plus tard, il efface des tablettes le record de points inscrits par un joueur en une saison. Il finit son ébouriffante campagne 2006 avec 2323 yards au total et 31 touchdowns (dont trois dans les airs). Et c’est sans compter sur ses deux passes victorieuses dans la endzone. Rarement joueur aura autant porté une attaque sur ses épaules.

Avec 492 points et un bilan de 14-2, les Chargers signent l’une des plus belles saisons régulières de leur histoire. Mieux encore qu’à l’époque d’Air Coryell et Dan Fouts. Malgré un Tomlinson une nouvelle fois intenable, San Diego tombe dès son premier match de playoffs. Les 187 yards et 2 touchdowns du coureur n’y font rien, les hommes de Norv Turner subissent la loi des Patriots et s’inclinent d’un soufflet (21-24). Des 50 votants appelés à décerner le titre de MVP, 44 accordent la première place à L.T. Si ça n’est pas un plébiscite, c’est plutôt bien imité. MVP, Joueur Offensif de l’Année, Pro Bowler, All-Pro et co-récipiendaire du Walter Payton Award avec son ancien coéquipier Drew Brees. C’est une avalanche de récompenses en tout genre qui s’abat sur son casque.

L’année suivante, il mène une nouvelle fois la ligue au petit jeu des yards gagnés au sol et devient le quatrième plus rapide joueur de l’histoire à atteindre le seuil des 10 000 unités. Les Chargers filent de nouveau en playoffs, mais avec un LaDainian Tomlinson diminué. Il participe tant bien que mal aux succès sur les Titans et Colts. Face aux Patriots, on se souvient davantage de lui, assis sur le banc, son casque à visière noire vissé sur la tête. Les hommes de Norv Turner s’inclinent de nouveau face à Brady & Co et on commence à s’interroger sur la résistance physique du joueur. S’il arrache une 8e saison à plus de 1000 yards, il n’enregistre que deux matchs à plus de 100 yards. Malgré une fiche statistique qui réjouirait bien des coureurs, il signe sa pire campagne professionnelle.

Derrière une ligne décimée, L.T. voit de moins en moins le ballon et doit se contenter de 730 maigres yards en 2009. S’il marque 12 fois, il plafonne à 3,3 petits yards par course. Loin de ses standards habituels. Les Chargers privés de jeu au sol s’en sortent plutôt bien et s’imposent 11 fois d’affilée. Avant de tomber sur les Jets de l’impétueux Mark Sanchez, son jeu au sol survitaminé et sa défense de fer. La décennie 2000 s’achève. La belle histoire entre LaDainian « The Flash » Tomlinson aussi. Le running back le plus dominant des années 2000. Seul Edgerrin James est parvenu à suivre la cadence. Et encore. Il pointe à 1897 longueurs de la boule d’énergie californienne. 138 touchdowns au sol. Jamais coureur n’aura autant marqué au cours d’une décennie. Blessures, âge, déclin, un Michael Turner avec des fourmis dans les jambes et un Norv Turner obsédé par les airs. Les Chargers choisissent de rompre avec Tomlinson et de mettre fin à 9 années de vie conjugale.

Un turbo chez les Jets

Agent libre pour la toute première fois de sa carrière, le vieillissant L.T. ne manque pas de courtisans. Mais si l’intéressé est encore convaincu d’avoir le calibre d’un coureur numéro un, les prétendants ne semblent pas vraiment sur la même longueur d’onde. Rapidement, le trentenaire doit se rendre à l’évidence : il devra partager le travail. Après moult négociations, ce sont finalement les bourreaux des Chargers en janvier qui raflent la mise. Séduit par le plan de jeu, le staff et l’équipe autour de lui, Tomlinson s’engage pour deux saisons avec les Jets. L’objectif : décrocher le titre qui lui manque et combler le vide au milieu de sa cascade de records et distinctions personnelles. Et il est persuadé que la franchise new-yorkaise lui offre l’opportunité d’accrocher une bague à son doigt. Espoir vain.

En signant son premier match à plus de 100 yards en près de deux ans, il rejoint Tony Dorsett au 7e rang de la liste des coureurs. Quelques semaines plus tard, il imite son idole Walter Payton et devient seulement le deuxième joueur de l’histoire à compter 13 000 yards au sol et 4000 dans les airs. Puis il  dépasse Eric Dickerson et ses lunettes pour grimper au 6e rang. Attendu comme la doublure de Shonn Greene, il finit la campagne 2010 avec plus de yards au compteur que son coéquipier. S’il flirte avec les 1000 yards, il doit se contenter de 6 touchdowns. Un revers en finale de l’AFC face aux Steelers et vient le temps du jubilé. L’occasion de peaufiner sa liste de records.

LaDainian rejoint Emmit Smith et Jerry Rice dans le club très (très !) fermé des joueurs à avoir inscrit au moins 160 touchdowns. En novembre 2011, il dépasse Barry Sanders et devient le 5e joueur à avoir gagné le plus de yards, dans les airs comme au sol. Puis il dépossède Jerome Bettis de sa place de 5e coureur le plus prolifique de l’histoire. Puis c’est la fin. Son contrat dans la Grosse Pomme achevé, il signe avec les Chargers et annonce immédiatement sa retraite en juin 2012. 13 684 yards, 145 touchdowns au sol, 162 au total, une liste de record longue comme le bras, une liste de récompense longue comme l’autre bras.

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