[portrait] Brian Cushing, le freak polémique

Avec son physique de déménageur sous stéroïdes, Brian Cushing incarne à lui-seul l’évolution de la NFL vers un type de joueur aux muscles saillants et à l’agressivité décuplée. Poursuivi depuis sa...

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Avec son physique de déménageur sous stéroïdes, Brian Cushing incarne à lui-seul l’évolution de la NFL vers un type de joueur aux muscles saillants et à l’agressivité décuplée. Poursuivi depuis sa jeunesse par des rumeurs de dopage, il n’en reste pas moins un joueur de talent, jamais le dernier à donner son corps pour son équipe.

La Vie de Brian

1939. La seconde Guerre Mondiale est sur le point de déchirer l’Europe et de la mettre à sang. Les Nazis, avant de commencer à étendre la terreur sur tout le Vieux Continent, débutent déjà leur entreprise folle de nettoyage ethnique en déplaçant des milliers de juifs polonais afin de les parquer dans des camps. Cinq ans plus tard, au milieu de celui situé près de Cologne naît la jeune Antoinette Lukaszewicz. Peu de temps après la fin de la guerre, comme beaucoup d’autres, la famille Lukaszewicz émigre aux États-Unis, munis de quelques habits épars et d’une valise.

C’est sur ce nouveau sol hospitalier, à Bayonne dans la banlieue de New York, qu’elle va y rencontrer un homme, militaire, qui va bientôt devenir son mari : Frank Cushing, analyste pour l’armée durant la Guerre du Vietnam et star de l’équipe de baseball de Seton Hall, avec laquelle il atteint la 5e place nationale au ranking en 1964. Les deux tourtereaux deviennent époux en 1968 et c’est avec lui qu’elle va retourner vivre dans son pays natal, lorsque Frank y est envoyé servir sur une base militaire américaine.

Revenus vivre aux États-Unis, les époux Cushing y élèvent leurs enfants, Michelle et Michael, dans la banlieue de New York, dans un Park Ridge situé à une trentaine de kilomètres de Manhattan. Et alors qu’Antoinette a déjà 40 ans, c’est en 1987, 13 ans après la naissance du cadet Michael que le couple accueille au sein de son foyer le petit-dernier, Brian. A la vue de ce petit frère de 4 kilos, Michael s’exclame : « il a déjà plus de muscles que moi ! ». Le début de la légende Brian Cushing…

Génétiquement, la famille Cushing est gâtée par la nature. La sœur Michelle est une star du football à l’académie « Immaculate Heart » du coin. Son frère Michael est lui une star sur les pistes d’athlétisme du lycée Bergen Catholic avant d’aller faire éclore son talent de rubgyman sous les couleurs de l’université de Providence. Sa famille est tellement sportive et protectrice qu’elle ne laisse pas le benjamin de la famille échapper à son destin et que Brian en conclut avoir « quatre parents ».

« Ray, c’est le meilleur à avoir joué. C’est lui que j’adorais quand j’étais gamin. C’est sur lui que j’ai modelé mon jeu. » Brian Cushing sur Ray Lewis

Le père de Brian prend l’éducation de son fils très au sérieux, voire un peu trop. Alors qu’il passe « pour le plus mauvais père de tout Park Ridge » avec ses conseils un peu trop vocaux, le changement s’opère suite à un voyage à Chicago alors que Brian a quatorze ans et s’apprête à entrer au lycée Bergen Catholic. Là-bas, il y rencontre Brian Williams, un pitcher pour les Cubs, qui lui assène une vérité qui va changer sa vie, et celle de Brian : « Si tout ce que vous me dites sur le talent de votre fils est vrai, ne serait-ce qu’à moitié, vous devez commencer à l’encourager. Il reçoit déjà suffisamment de critiques ».

Freaking Cushing
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Avec un père d’1m83 pour 100 kilos et une mère atteignant le mètre soixante-dix-sept, Brian se développe physiquement comme peu dans le coin. A 13 ans, il rencontre également Joe DeFranco, un préparateur physique dont le slogan s’affiche maintenant sur les t-shirts à l’effigie de sa salle de sport : « Train. Eat. Supplement » (« Entraine-toi, Mange, Prends des suppléments (alimentaires) »). Ayant aussi été élève à la Bergen Catholic, la connexion est immédiate avec Brian, qui y joue linebacker, receveur, tight end, running back et retourneur de coup d’envoi. Avec sa poussée de croissance, à cause de laquelle Frank se rappelle même avoir été obligé d’emmener Brian à l’hôpital, le jeune homme devient un « freak » athlétique, un phénomène hors-norme. Forcément, avec la réputation qu’ont les salles de sport, et dans un sport américain de la fin des 90’s gangréné par le dopage, les regards se tournent vers le « Bergen Bulldog », comme certains le surnomment. Comment un joueur de son âge peut-il posséder une telle musculature sans prendre de produits illicites ? DeFranco justifie tout ça en parlant d’une excellente génétique, d’une bonne alimentation et de la prise des bons suppléments, en plus d’un état d’esprit de compétiteur acharné en salle de musculation. Tony Karcich, l’entraineur de l’équipe de St-John’s contre laquelle Brian vient de marquer 5 touchdowns, ne voit non plus rien à redire sur un joueur grand et, après tout, « prendre des stéroïdes ne fait pas grandir ». Frank Cushing, lui, défend son fils en indiquant que s’il « déteste bien une chose et qu’il ne l’accepte pas, ce sont les drogues », avouant que le reste de la « culture masculine », comme les femmes ou l’alcool, ne lui pose par contre aucun problème.

Cette polémique ne fera que reprendre de l’ampleur en 2010 lorsque le joueur des Texans est suspendu pour 4 matches par la NFL suite à une infraction sur les produits dopants, un reporter d’ESPN qualifiant même la substance d’agent masquant de stéroïdes. Tout ceci un an après avoir été testé positif au HCG, une hormone permettant de faire repartir la production de testostérone après un cycle stéroïdien, et que Brian Cushing se défend d’avoir ingéré. La défense du joueur, proche de celle d’un désespéré, l’amène sur un terrain troublant, arguant du fait que le nouveau test revenu positif l’a été « suite à un sur-entrainement ayant entrainé des dérèglements hormonaux ».

La suspicion ne cesse donc d’accompagner la carrière de Brian à Bergen High. Ses multiples sélections de All-State et All-American l’éteignent juste le temps de s’apercevoir du talent énorme du joueur au poste de linebacker. Alors qu’il doit choisir une université pour continuer sa route, il est considéré comme le 2e meilleur joueur du pays à ce poste.

Can’t stop, won’t stop
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Avec une famille catholique irlandaise, sa prochaine étape rêvée ne peut que l’emmener sur le campus de Notre Dame, à South Bend dans l’Indiana. Les Fighting Irish ne sont pas seuls sur le coup, USC, Virginia, Boston College, Florida ou Miami ne voulant pas non plus passer à côté d’un joueur dominant. Alors que ses valises sont presque prêtes pour s’envoler revêtir l’uniforme doré et bleu, le renvoi du coach Tyrone Willingham bouleverse tous ses plans. Plus question d’y aller ! Frank pousse en faveur de Boston College, Michael veut voir son frère sous le maillot de « The U » mais c’est finalement de l’autre côté du pays que Brian Cushing va atterrir, sous un autre maillot également à parure dorée mais bordeaux celui-ci : USC, University of Southern California. Une équipe des Trojans en route pour remporter leur second titre national consécutif avec, à leur tête, un certain Pete Caroll. Et comme le dit Frank : « Je ne sais pas comment quelqu’un peut dire non à Pete ».

« Je veux jouer au foot pendant un bon bout de temps, jusqu’à la quarantaine. Je veux être un leader, un capitaine et créer le buzz en NFL. Mon but, c’est que les gens disent de moi « Hey, on sait qui c’est !» »Brian Cushing sur son avenir en NFL avant sa draft

C’est sur le campus de Los Angeles que Brian réalise que son avenir ne peut s’écrire qu’en NFL. Arrivant tout juste de Bergen Catholic, il se retrouve à l’entrainement face à des monstres tels que Reggie Bush ou Matt Leinart (oui, oui, en NCAA, Matt Leinart était un monstre…) qui ne font qu’aiguiser un peu plus son appétit de compétition. Dans la même promotion se trouvent également deux spécimens au poste de linebacker : Rey Maualuga et Clay Matthews. Le même trio qui aura droit à sa couverture de Sports Illustrated quatre ans plus tard pour annoncer leur arrivée retentissante en NFL. Entre ces deux dates, 3 Rose Bowls de gagnés pour les Trojans mais un de perdu, celui de la saison 2005 (techniquement joué le 4 janvier 2006), le plus important sans doute puisque le match couronnait alors le champion NCAA. C’était encore l’époque où l’on pouvait dire sans rire que « Vince Young just wins football games ». Ces 4 Rose Bowls disputés comme titulaire constituent d’ailleurs un record que Brian partage avec Archie Griffin, le légendaire running back des Ohio State Buckeyes.

Surtout, la machine Brian Cushing ne s’arrête jamais de plaquer. Un moteur hors du commun et sa versatilité lui permettant de jouer au poste de defensive end Elephant dans une variation de la défense 3-4, faisant alors la réputation de USC, le même poste occupé par Julius Peppers dans la défense des Packers à son arrivée. C’est néanmoins au poste de strong-side linebacker que Cushing excelle, toujours prêt à foncer vers la ligne d’engagement ou à aller mettre un gros plaquage sur un tight end voulant bloquer. Il finit sa carrière de Trojan avec 178 plaquages en 44 matches joués, soit une moyenne de 4 par match.

« Il ne connaît qu’une vitesse de jeu donc il faut prendre le bon et le moins bon avec lui. Il va vous dégommer et puis il va se faire mal en essayant de vous dégommer. Ça fait partie du truc » Ken Norton Jr., coach des linebackers à USC.

C’est sans réelle surprise que les Texans le sélectionnent en 15e position de la draft 2009, alors que les Seahawks lui préfèrent Aaron Curry au 4e rang et que les Packers sont tout heureux de voir Clay Matthews tomber dans leur escarcelle en 29e place. Le 3e compère Maualuga devra attendre, lui le 2e tour pour se voir choisi par les Bengals.

S’il démarre sa carrière sur les chapeaux de roue en gagnant un titre de Defensive Rookie of the Year et un statut de Pro Bowler au terme d’une première saison extrêmement pleine avec, entre autres, 133 plaquages, 4 interceptions et 1 safety, sa suspension pour dopage l’année suivante met un coup de frein à ses ambitions. Il se reprend en 2011 avant de voir ses saisons 2012 et 2013 gâchées par deux terribles blessures, avec une rupture des ligaments lors d’un Monday Night Football face aux Jets en 2012 et une rupture des ligaments et un péroné brisé lors d’un match contre les Chiefs en 2013.

Malgré ces contre-temps, Cushing revient à un excellent niveau. Encore cette saison, il dépasse les 100 plaquages. Un vrai atout de taille pour une défense des Texans qui compte déjà en JJ Watt un capitaine de calibre MVP.

Pour leur grand retour en playoffs après 3 ans d’absence cette saison, les Texans compteront encore sur Brian Cushing ce samedi contre les Chiefs. Les plaquages seront forcément au rendez-vous, c’est la marque de fabrique du freak.

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