[portrait] Philip Rivers, ainsi soit-il !

Il est le quarterback de la draft 2004 qui ne possède aucune bague alors que ses contemporains, Manning et Roethlisberger, en ont deux chacun. Peut-être le talent le plus naturel des trois,...

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Il est le quarterback de la draft 2004 qui ne possède aucune bague alors que ses contemporains, Manning et Roethlisberger, en ont deux chacun. Peut-être le talent le plus naturel des trois, il n’a pourtant jamais joué dans un Super Bowl et n’a atteint la Finale de Conférence qu’une seule fois en 10 saisons, en 2007, match qu’il aura joué avec un ligament rompu. Mais a-t-on jamais jugé Philip Rivers sur ces accomplissements plutôt qu’en comparaison de ceux des autres ?

De « Cry Baby » à plusieurs bébés…

Philip Rivers, tout excité sur la ligne de touche, un spectacle souvent réjouissant pour les fans!

Philip Rivers, tout excité sur la ligne de touche, un spectacle souvent réjouissant pour les fans!

Avec sa machoire carrée, ses airs orgueilleux, son sourire qui brille de mille feux, sa réputation de « pleureuse » et ses éclats de voix à l’encontre de ses coéquipiers, on pourrait croire que Philip Rivers sort d’un programme expérimental « made in Texas », là où l’on fabrique des quarterbacks-machines élevés depuis leur plus tendre enfance pour arriver au sommet, tel le JD Mc Coy arrogant et détestable des dernières saisons de l’indispensable série « Friday Night Lights ». Mais si Philips Rivers partage bien une partie de ces caractéristiques, son parcours de vie et ses choix l’en démarquent également. Sa fervente foi catholique dans un Sud des Etats-Unis à écrasante majorité protestante en est une preuve.
Et puis, ce n’est pas tous les jours qu’un athlète professionnel, au calendrier extrêmement chargé pendant la majorité de l’année, fait le choix d’avoir sept enfants en 12 ans (note de l’auteur : avec la même femme, Antonio Cromartie! ), dont le premier lors de sa dernière année d’université. Mais si la religion a une place fondamentale dans le cœur de Rivers, c’est à celle qui se joue sur les terrains verts qu’il a dédié l’autre moitié de sa vie.

« Mes garçons m’ont vu dans ce rôle de leader et s’en sont inspirés. Ils veulent être ceux en position de décider. Ils en ont eu tous les deux l’opportunité et ils ont un amour et une passion du jeu, tout comme moi » Steve Rivers, père de Philip et Stephen, en 2010

Quand on nait à Decatur, à moins de 30mns de Huntsville où se trouve le campus de l’Université d’Alabama, la question du choix de votre sport favori ne se pose pas vraiment. Encore moins lorsque votre père se trouve être coach du lycée du coin, après avoir été l’un des linebackers stars de l’Université de Mississippi State dans les années 70. Sa trajectoire faite de hauts, mais aussi de quelques bas, commencera donc ici pour lui dont l’idole se nomme alors Steve Young, le quarterback des 49ers. La vie étant plutôt bien faite, en général, c’est ce même Steve Young qui le devance encore actuellement au quarterback-rating en carrière de quelques petits dixièmes (96,8 pour Young, 96,3 pour Rivers). Une motivation supplémentaire pour lui.

Enfant, il se voit tellement évoluer au plus haut niveau qu’il se permet d’amener une couverture du magazine Sports Illustrated avec sa tête collée dessus lorsque le projet de classe demande aux élèves d’énoncer leurs rêves et aspirations. Cette quête perpetuelle de l’excellence, dont un goût prononcé (et pour le moins bizarre…) pour les terrains de sport parfaitement entretenus, le poussera à passer chez les ennemis du lycée d’Athens, là où son père a récuperé le poste de coach. Il semble que la polémique suive donc Philip Rivers depuis son plus jeune âge, tout comme le #17 qu’il porte depuis ses débuts, en hommage à son père.

« Vous savez, en Alabama, vous naissez fan d’Auburn ou d’Alabama, sauf chez les Rivers » Allen Creasy, coach d’Athens en 2010

L’excellence est la norm(e)
Si le coach du lycée d’Athens s’est ainsi prononcé il y a quelques années de cela, c’est qu’il parlait alors de Stephen Rivers, le frère cadet de Philip, actuellement à Vanderbilt après avoir passé 3 ans à LSU. C’est que le jeune quarterback a suivi les traces de son frère qui, en 2000, avait choisi de ne pas répondre aux sollicitations des universités prestigieuses du coin, alors même qu’il sortait d’une excellente saison de lycée. Peu sûr de pouvoir gagner sa place au sein  d’un effectif d’une si grosse écurie au poste de quarterback, il préfère se diriger au Nord vers North Carolina State. Avant même de passer 5 saisons sous les ordres d’un Norv (Turner) chez les Chargers, c’est à un presque honomyne, Norm (Chow), qu’il décide de confier son destin devant le mener à la NFL. Le hasard n’ayant jamais sa place dans la vie de Philip Rivers, c’est bien la présence de l’ex-mentor de Steve Young, comme coordinateur offensif des Wolfpacks, qui est l’élément déclencheur de son choix.

« Il lance des passes faciles à attraper, que ce soit en diagonale ou en profondeur. Ses passes s’attrapent toutes seules » Danny Woodhead, en 2014

D’un modèle totalement différent de celui qui a été le premier véritable quarterback « double-threat », Philip Rivers joue quand même de son physique de jeune premier (1m95, 110 kilos) pour s’imposer dès son année freshman. Malgré toutes sortes de records accumulés au cours de ses 4 ans sous le maillot rouge et blanc (que revêtiront plus tard des joueurs comme Mario Williams ou Russell Wilson), dont près de 4500 yards lors de sa saison senior en 13 matches, Philip Rivers ne paraît pas être le prospect préféré des scouts pros. En cause, une mécanique de lancer très « particulière », qui s’apparente plus à un « pousser » de ballon en l’air et qui, combinée à un travail des pieds un peu pataud et un manque d’engagement vers l’avant, donne une allure extrêmement bizarre à chacune de ses passes, malgré la vitesse de lancer et la précision dont il peut faire preuve.

Et si…
Sa « génération » de draft présentant des phénomènes comme Eli Manning et Ben Roethlisberger, le nom de Philip Rivers n’est donc qu’un pis-aller pour le GM de New York d’alors, Ernie Accorsi. Responsable de la draft polemique de John Elway par les Colts en 1983, il a déjà placé son viseur sur Eli Manning, sélectionné contre son gré par les Chargers en 1ère position. Un trade n’étant jamais vraiment réalisé avant qu’il ne soit officialisé par la ligue, le GM des Giants remplit tout de même sa fiche de sélection avec un autre nom, celui de Ben Roethlisberger, au cas où les Chargers et les Giants ne parviennent pas à un accord dans le temps imparti.
C’est finalement aux Chargers que Rivers atterrit, eux qui comptent pourtant déjà dans leur rangs Drew Brees, drafté en 2002 mais en difficulté sur la saison 2003. Philip Rivers aurait-il connu la même réussite à Pittsburgh, sa destination probable si l’échange avec Manning n’avait pas eu lieu ?

« Si vous demandez aux trois quarterbacks impliqués, ils vous diront tous qu’ils sont très contents d’être là où ils sont » Ben Roethlisberger, en 2012

Douze ans plus tard, les Californiens du Sud ne regrettent surement pas leur choix. Indestructible leader de son équipe (aucun match manqué en carrière), ses statistiques le placent sur les mêmes bases que Brett Favre, Tom Brady et…Drew Brees. Plus de 32000 yards à la passe, presque 230 touchdowns (avec un taux de 5,4% de touchdowns par rapport aux nombres de passes tentées, la 5e marque parmi les quarterbacks en activité) et la 4e meilleure évaluation de l’histoire (96,3), le quarterback de San Diego a tout du Hall-of-Famer qu’il a toujours aspiré à devenir. Sa résurgence depuis 2012 (qui lui a valu le trophée de Comeback player of the year en 2013) et sa volonté d’améliorer son taux de passes complétées quitte à délaisser les passes longues qu’il aime tant, ont remis les Chargers sur la carte de la NFL. Invités de dernière minute en playoffs l’an dernier, vainqueurs des Seahawks cette saison, l’exercice 2014 sera-t-il le bon pour la franchise ?

Plus encore qu’ouvrir le compteur de Super Bowls gagnés par sa franchise, Philip Rivers pourrait surtout reprendre à son compte l’exclamation de son idole d’enfance Steve Young, après sa victoire en 1994 lors du Super Bowl XXIX : « I got the monkey off my back ! » (« J’ai résolu mon problème! »). Une finale gagnée contre, qui d’autre évidemment, les San Diego Chargers. Une belle façon de définitivement entrer dans l’histoire pour Philip Rivers.

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