Super Bowl LII – L’US Bank Stadium, cathédrale du football et tueur d’oiseaux

Le stade des Vikings régale les amateurs de football mais représente un danger pour les migrateurs.

Le dimanche 4 février, les rêves de titre NFL d’une franchise vont s’écraser sur la pelouse de l’US Bank Stadium. Le même jour, un ou plusieurs oiseaux vont aussi s’écraser, mais directement sur la façade.

Car s’il est un bijou technologique, le stade des Vikings est aussi un piège terrible pour les migrateurs. Une sorte de concentré du monde actuel, ou la nature doit trop souvent s’incliner face à la technologie, alors qu’il y avait moyen de faire autrement. Un stade qui a déjà une drôle d’histoire, mais qui est aussi né de drôles d’anecdotes.

Toit écroulé et terrain gelé

Installés au Metrodome depuis 1982, les Vikings commencent à parler d’un nouveau stade en 2007. Et puis, en 2010, les éléments envoient un signe clair. Sous le poids de la neige, le toit cède.

Dix-huit millions de dollars plus tard, le toit est réparé. Mais le compte à rebours est lancé. En 2012, le financement est voté. 2013, présentation des plans pour un stade couvert de 66 655 places en configuration classique, et 73 000 pour le Super Bowl.

Le Metrodome est détruit, place aux travaux ! Pendant ce temps, les joueurs partent se geler pendant deux saisons sur le terrain extérieur de la fac locale. C’est là, sur un terrain dur comme du béton, que la carrière de Brett Favre prend fin, sur un coup de tête.

Un bijou nordique

Pour bâtir leur stade, les Vikings font appel à la firme HKS, Inc, une vieille connaissance de la NFL, qui a déjà bâti les nouvelles enceintes des Cowboys et Colts. Et encore une fois, le résultat s’annonce grandiose. Pas question de reproduire le fiasco du toit du Metrodome. Cette fois, la neige tombera sur une structure en pente, qui évacuera les flocons plus facilement. Des gouttières chauffées sont même installées, et l’eau file vers le fleuve Mississippi. Heureux hasard, c’est du côté de la Scandinavie que l’inspiration est trouvée. Tant mieux, cela colle avec l’histoire de la franchise.

Ce toit gigantesque s’étale sur 22 000 mètres carré. Il est composé à 60% d’éthylène tétrafluoroéthylène, un plastique transparent. De quoi offrir au passage une belle vue sur le centre-ville. Les portes latérales sont les plus grandes du monde, et elles pivotent pour laisser entrer le public d’une manière assez impressionnante.

Le ruban est coupé le 22 juillet 2016. Le premier match de présaison des Vikings a lieu le 28 août. Et pour la petite histoire, ce sont les Chargers qui marquent le premier touchdown. Pas grave, le premier match de saison régulière sur place se solde par une victoire 17-14 sur le rival Green Bay. Le 18 janvier dernier, le premier match de playoffs de l’histoire de l’enceinte est bouclé par le touchdown miraculeux de Stefon Diggs pour terrasser les Saints à la dernière seconde. A priori, les violets ont trouvé leur place dans leur nouvel écrin. Et le public leur rend bien, avec un niveau sonore très élevé, aidé par les matériaux choisis pour la construction du toit. Contre les Saints, les 130 décibels sont atteints. Il n’y a qu’a Seattle ou Kansas City qu’on fait mieux.

Un piège à oiseaux

« Nous savions que le verre réfléchissant allait embrouiller les oiseaux. Ils voient une réfection du ciel bleu dans la glace, ils pensent que c’est du ciel bleu. Ils voient le reflet des arbres, ils pensent qu’ils peuvent se poser sur ces arbres », expliquait Jim Sharpensteen, un volontaire d’une association de protection des animaux, à Citypages en février 2017.

Sur une période de 11 semaines à partir d’août 2016, les bénévoles de trois associations ont régulièrement fait le tour du stade. Ils y ont trouvé 60 oiseaux morts et 14 autres blessés. Tout ça sans compter ceux qui ont sûrement été retirés par les employés du stade, puisque les bénévoles ne pouvaient passer qu’une seule fois par jour au maximum. D’autres oiseaux ont aussi pu frapper la paroi et aller mourir plus loin. Pour ne rien arranger, le stade se situe en plein milieu d’une route de migration. Cela fait au moins 300 victimes par an. Au minimum.

Ce qui est sûr, c’est qu’aucun bâtiment ne tue autant d’oiseaux dans tout le Minnesota.

Si les défenseurs des animaux sont attristés, c’est surtout parce qu’il était possible d’éviter l’hécatombe. Dès 2014, la Audubon Society, qui oeuvre pour la protection des oiseaux migrateurs, avait demandé aux responsables du projet d’utiliser un verre traité de manière différente, qui induit moins les oiseaux en erreur. Ce verre est notamment utilisé sur des grattes-ciel. Le souci ? L’argent, évidemment.

Le stade est désormais en fonction, mais des solutions existent encore, comme l’application d’un film sur les vitres. D’autres structures l’ont déjà fait. À New York, le Javits Center est même devenu un paradis pour les oiseaux, alors qu’il était autrefois un piège pour eux.

Depuis que le problème a été soulevé et relayé, les Vikings et la Minnesota Sports Facilities Authority, qui gère l’enceinte, ont accepté de s’associer à la Audubon Society pour lancer une étude.

« Des oiseaux meurent à cause des vitres du stade. La seule chose qu’une nouvelle étude va faire c’est gagner du temps à ne rien faire pour les Vikings », réplique tout de même une des membres de l’association.

Et bien sûr, la Minnesota Sports Facilities Authority ne veut pas s’exprimer sur le sujet avant la finalisation de l’étude en 2019.

Dommage, car l’US Bank Stadium est pourtant tourné vers les économies d’énergie, avec un éclairage LED basse consommation, un système d’irrigation à haute efficacité, et une consommation bien plus basse que le Metrodome. Une réussite presque totale. Sauf pour les oiseaux. Un mauvais présage pour les Eagles ?

https://www.youtube.com/watch?v=ISDgto1nUB0

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