[portrait] La story du vendredi – Darius Leonard : ombre et lumière

Darius Leonard est passé de l'ombre à la lumière en un éclair.

Tous les vendredi, la rédaction de TDActu vous propose le portrait d’un acteur NFL. Son parcours sportif, ses succès et ses échecs, son parcours de vie. Darius Leonard est rapidement devenu un incontournable en NFL.

Darius Leonard

Né le 25 juillet 1995 à Nichols, Caroline du sud
1m88 pour 100 kilos
Linebacker, Indianapolis Colts, 2e saison

Une star est née

Darius Leonard ou comment passer de l’ombre à la lumière en un clin d’oeil ! Février 2018, sa quatrième et dernière saison universitaire est terminée : 113 plaquages et 8 sacks. Impressionnant. Mais pour être impressionné encore faut-il avoir suivi la modeste université de South Carolina State. Une école publique dont l’équipe de football évolue en division FCS, soit un niveau en dessous des 130 évoluant en division FBS. Hormis donc quelques évaluateurs régionaux, personne ne le connait. Un an plus tard, en février 2019, il remporte le titre de rookie défensif de l’année et il est nommé dans la première équipe en NFL. Cet ascenseur social éclair !

163 plaquages, meilleur total en NFL. 7 sacks, 8 passes défendues et quatre fumbles forcés dont deux qu’il recouvre lui-même : il attrape les néons et, fermement, les braquent sur lui en 2018. Il devient respecté par ses pairs (26e du NFL Top 100, votés par les joueurs) et les médias le mentionnent dès que le sujet se porte sur un linebacker. Une saison une seule et déjà, il est considéré comme un des meilleurs à son poste. Pourtant le chemin fut long et semé d’embuches pour pouvoir capter puis refléter cette lumière.

Choisir le bon exemple

Enfant, dans un milieu très rural, il vit avec une mère célibataire et huit frères et sœurs. Enfin surtout six d’entre-eux car deux frères plus âgés sont eux en prison (pour meurtres). Darius est très proche de Keivonte son ainé d’un an. Ils sont les meilleurs amis du monde et ne se quittent jamais, ils dorment ensemble d’ailleurs : Keivonte à gauche du lit, Darius à droite. Quelques années plus tard, un soir de 2012, l’ainé sort pour aller en boite de nuit et la soirée se termine à l’hôpital puis à la morgue. Une affaire toujours non-résolue à ce jour dont la conclusion est inévitablement : au mauvais endroit, au mauvais moment.

Keivonte à gauche et Darius

Aujourd’hui encore, Darius Leonard avoue qu’il a beaucoup de mal à dormir sur son coté droit, celui duquel enfant, il voyait son frère à ses cotés dans le lit. Cependant, prison et décès ne sont pas les seuls exemples de famille avec lesquels il grandit. Son ainé de dix ans, Anthony Waters est un modèle positif pour son jeune demi-frère, un élément d’espoir : s’il ne joue en tout que 20 matchs en NFL (Chargers et Saints), contrairement au regretté Keivonte, il est au bon endroit au bon moment et il remporte le Super Bowl 44 avec la franchise de Louisiane. Si les titulaires au poste de linebacker ont pour noms Vilma, Fujita et Casillas, Waters fait partie des 53 et officie surtout en équipe spéciale. Peu importe s’il n’est pas le MVP de l’équipe, il a gagné le droit de porter une bague de champion et cela rend fier et ambitieux le jeune Darius (14 ans à cette époque).

Adolescent, Darius n’est pas costaud et Anthony explique au petit dernier que s’il veut l’imiter alors il va devoir travailler. Dur ! 19h et comme souvent Darius n’est toujours pas rentré à la maison alors bien que connaissant déjà la réponse, à la maison on appelle l’entraineur du lycée :

« Il est encore là, il travaille seul alors que tous les autres sont rentrés chez eux. », répète jour après jour au téléphone Daryl King son entraineur, Indy Star

Et le travail paye. Il est le meilleur de son équipe et son entraineur ne peut le mettre ne serait-ce qu’une minute sur la touche : Darius Leonard joue running-back, receveur, linebacker, safety et même punter.

Couleur préférée : orange

En Caroline du Sud, plus que les Panthers de Charlotte au nord, c’est l’université de Clemson qui fait rêver les jeunes footballeurs. La fac jouant en orange où Anthony Waters a évolué, avec notamment une saison à 102 plaquages (en 2005). Darius en rêve, lui qui le plus souvent possible rejoignait son congénère dans la Death Valley pour se mèler aux 80 000 spectateurs des matchs des Tigers. Enfant, sa chambre est recouverte de posters et autres écharpes aux couleurs de l’université.

Il rêve son avenir, là. Mais cette offre ne viendra jamais. Dorian O’Daniel (Chiefs) et Ben Boulware sont les recrues 2013 au poste de linebacker à Clemson.

Darius Leonard et Anthony Waters avant le match contre Clemson.

Trop maigre ? Pas encore qualifié au niveau académique (il le sera deux semaines après le jour des signatures) ? Ou tout simplement parce que l’équipe de ce petit coin perdu évolue en division 1A, là où les meilleurs lycées reçoivent l’appellation 5A. Alors adieu le orange de Clemson, ce sera South Carolina State. Dans la ville de…Orangeburg.

Loin du niveau du power five : la conférence ACC où évolue Clemson fait partie des 5 meilleures conférences universitaires. Cependant il a eu l’occasion, une fois, de fouler la pelouse de ses rêves. En face, le Clemson de Deshaun Watson (Texans), Mike Williams (Chargers) et Christian Wilkins (Dolphins). Le Clemson champion à l’issue de cette saison 2016, alors forcément de match il n’y eu pas : 59 à 0 !

« Je viens ici depuis l’âge de dix ans et c’est vraiment l’endroit où je revais de jouer. C’était génial d’être là et de leur montrer ce qu’il aurait pu avoir. » Darius Leonard pour theundefeated.com

Darius Leonard chassant Nick Schuessler, le remplaçant de Deshaun Watson dans le 4e quart-temps. (Richard Shiro, AP)

Leonard a eu l’occasion, si ce n’est de prendre une revanche, tout au moins de s’y montrer avec un imposant total de 19 plaquages. Et un field-goal contré. Une production remarquable. Et remarquée.

The Maniac

Cette performance ce samedi-là n’est pas passé inaperçue et notamment pour un homme crucial dans le destin de Leonard : Jamie Moore. Depuis 2006 il est scout dans la région sud-est du pays pour les Colts. Depuis son domicile de Jacksonville, il regarde les matchs de ce linebacker et en vient à la conclusion qu’il doit absolument se rendre sur place. Lors du premier entrainement auquel Moore assiste, son regard est tout d’abord attiré par un joueur lors des étirements, celui-ci bouge, parle, chante, danse. Puis se tournant vers un journaliste local, il demande lequel est Darius Leonard ? Bingo. Celui qui met l’ambiance.

« J’aime être sur le bord de touche afin de voir comment le joueur interagit avec ses coéquipiers, avec ses entraineurs, son attitude générale. », Jamie Moore pour Indy Star.

Ainsi il constate le regard de ce dernier lors d’un échauffement d’avant-match : « l’œil du tigre » décrit-il. En plus de son jeu, Jamie Moore commence a vraiment regarder ce joueur avec envie en raison de son caractère :

« Nous voulons des joueurs athlétiques pour notre système défensif et aussi des joueurs avec du caractère, de l’énergie et de l’intensité. C’est ce que Chris Ballard veut. Et Leonard a tout cela. », colts.com

Alors, après avoir entendu éloges sur éloges depuis plus d’un an de la part de Jamie Moore, Chris Ballard est on ne peut plus attentif à ce joueur lors des entrainements de la semaine du Senior Bowl (réunissant les meilleurs joueurs ayant terminés leurs cursus académiques). Il y constate cette intensité lors des ateliers, cette énergie communicative dans son rapport à l’autre. Le samedi, Darius Leonard remporte le match Sud-Nord en étant le meilleur plaqueur du match avec quatorze stops : il est élu MVP défensif.

Il n’en fallait pas plus pour le manager des Colts. Après avoir misé sur un choix décrit comme « sûr » en la personne de Quenton Nelson au 1e tour, il utilise le choix numéro 36 sur ce joueur venant d’une petite université. Un pari, forcément. Dès le lendemain, en commentaire, le site Bleacher Report écrit ces lignes :

« Un des choix les plus mauvais de cette draft. Pour une raison inconnue, nous nous sommes réveillés vendredi dans un monde où les Colts pensent que prendre un linebacker de niveau FCS dans le top 40 est une bonne idée. », Bleacher Report

Habitué depuis son adolescence à être sous-coté, Darius Leonard s’est toujours servi de cela pour continuer à progresser. À l’énoncé de cet article du pourtant réputé B/R, il sort son téléphone et montre à Zak Keefer du Indy Star :

« j’ai une photo de ça. Je l’adore. Le plan a toujours été pour moi de faire en sorte que ces gens-là paraissent stupides. »

Le Maniac (son surnom) est sorti de l’ombre et il compte bien rester dans la lumière de longues années encore. Chacun sa lumière favorite, lui préfère qu’elle soit naturelle : donner à manger à ses chevaux plutôt que la lumière artificielle des plateaux de télévision.

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