Jersey Island : Le ballon de football américain

Tout le monde le veut, tout le monde lui coure après. Il est le symbole de l'action et de la victoire.

Dernier détour dans le monde des équipements hautement symboliques du football américain. Après avoir visité les maillots et les casques, arrêt final pour s’intéresser à l’objet central du jeu : le ballon.

« Qu’est ce que cela ? C’est un sphéroïde prolate, une sphère allongée dans laquelle l’enveloppe extérieure en cuir est fermement cousue autour d’une chambre à air légèrement plus petite. Je préférerais être mort en bas âge que de laisser tomber ce ballon. » – John Heisman

Le contexte est posé.

Le ballon est l’objet ultime du football, au point qu’il a donné son nom au jeu.

En un siècle et demi d’existence, le football Américain a évolué d’une rixe terrestre désorganisée à des raids aériens millimétrés et chorégraphiés avec le plus grand soin, uniquement dans le but de faire avancer cette damnée balle le plus efficacement possible.

Suivant un principe de rétroaction, le ballon a suivi les évolutions du football pour se conformer de plus en plus à sa mission. De grosse pastèque privilégiant les portés à la course et les coups de pieds, il est progressivement  devenu une fléchette dans sa version actuelle, voire un missile, pour favoriser la progression part la voie des airs.

Les débuts du football : l’héritage du rugby et du soccer

On date les débuts officiels du football américain avec la rencontre Rutgers-Princeton de 1869. S’il s’organise sur les bases héritées des Football Associations (qui donneront le terme soccer qui qualifie le football européen), le jeu en lui-même s’inspire grandement du rugby. A l’origine intégralement tourné vers la course et le jeu au pied, le football utilise à partir de 1874 une grosse balle ovoïde et lourde, à mi chemin entre un ballon de rugby et une balle de basketball.

Le premier ballon de football en cuir apparaît en 1887, lorsqu’un lanceur des Red Sox de Boston, un certain Spalding, produit le premier exemplaire, muni des fameux lacets. La forme est retravaillée, mais la balle reste assez proche de son homologue Britannique.

La grande crise que connait le football en 1905 (année surnommée « Moisson de la Mort » par le Chicago Tribune à cause des 18 décès recensés sur les terrains cette année là) pousse les autorités à transformer le jeu afin d’assurer plus de sécurité pour les joueurs. Le Président Theodore Roosevelt convoque les représentants des grandes universités américaines à la Maison Blanche et les somme de changer leur discipline sous peine d’interdiction. Si bien qu’au début 1906 émergent les bases de ce qui deviendra le jeu moderne et de la NCAA. Le plus gros bouleversement est bien évidemment l’autorisation de la passe en avant, même si cette nouvelle tactique met du temps à s’imposer. Presque 10 ans seront nécessaires pour que les équipes s’emparent complètement de cet aspect du jeu.

La passe transforme le ballon

Une des conséquences des nouvelles décisions est l’évolution en 1912 de la forme du ballon, qui se standardise pour la première fois. Suite à une modification des règles universitaires rapidement adoptée par les professionnels, la balle échange sa forme de pastèque pour un format qui nous est plus familier aujourd’hui, quoi qu’encore surdimensionné. Son poids tourne alors autour de 500 grammes.

Et d’un coup, le football se transforme, en un match selon la légende. Le 1er novembre 1913 Notre Dame écrase Army – pourtant largement favorite – à West Point sur un score de 35 à 13. Menés par le duo Charlie « Gus » Dorais et Knute Rockne, les Fighting Irish associent pour la première fois de façon consistante les jeux terrestre et aérien pour s’imposer. Ils ne sont pas des pionniers certes, mais ce sont les premiers architectes des temps à venir.

La passe permet donc désormais de gagner des matchs. Mais elle va aussi permettre de remporter des championnats. A Green Bay, Earl « Curly » Lambeau prend la ligue d’assaut. Armé du duo formé par le quarterback Arnie Herber (2 fois meilleur passeur de la ligue) et le receveur Don Hutson, le révolutionnaire entraineur des Packers sera un innovateur du jeu de passe et remportera 6 titres entre 1929 et 1944, dont un triplé. L’exemple étant donné, toute la ligue se met à copier les Packers et leur recette du succès.

En 1934, George Halas convainc la NFL d’engager Hugh « Shorty » Ray comme conseiller technique pour moderniser les règles du football et entrainer les arbitres. Afin de rénover la discipline, Ray veut augmenter la rapidité du jeu et l’efficacité de la passe. Pour cela, il redessine le ballon afin de le rendre plus aérodynamique et modifie les règles pour favoriser les actions aériennes. La balle diminue de taille et acquiert ses extrémités plus effilées. Les arbitres sont formés pour remettre rapidement le ballon en jeu et les passes incomplètes ne provoquent plus de changement de possession.

Le jeu de passe prend son envol. Alors que le leader en yards lancés en 1932 plafonne à 639 longueurs, le seuil des 1200 yards est dépassé en 1936, les 2000 yards en 1942. Afin de compléter la progression Johnny Unitas franchit les 3000 yards en 1960, puis que Dan Fouts passe pour 4000 yards en 1979. Enfin Dan Marino pulvérise les 5000 yards en 1984.

Moins de changements, plus d’innovations

A partir de 1920 le ballon officiel de la NFL est produit par Wilson Sporting Goods, et reçoit le surnom de « The Duke » entre 1941 et 1970. Le sobriquet a été poussé par George Halas auprès de Wilson pour rendre hommage à Wellington Mara, propriétaire des Giants de New York, qui a arrangé l’accord entre le fournisseur et la ligue. Seul problème, le nom est la propriété de Spalding et doit être racheté au concurrent.

Spalding, qui équipe l’American Football League concurrente jusqu’à la fusion en 1970, revient à la dénomination technique J5-V qui caractérise bien sa version plus petite et profilée encore plus destinée au jeu de passe que sa contrepartie estampillée NFL. Suite à l’union des deux ligues, la balle prend le simple nom de NFL ball, jusqu’en 2006 où le surnom « The Duke » est réintroduit à titre commémoratif.

Après la fusion, Wilson continue les évolutions, même si les dimensions du ballon ne changent plus. La compagnie met en place des innovations pour l’étanchéité, les valves, les coutures, les matériaux et même les couleurs.

En 1951 une version en caoutchouc est brièvement essayée sans grand succès. En 1955, Wilson introduit le Grip-Tite (ou Tanned-in-Tack) un nouveau matériau qui permet une meilleure préhension, même en cas d’humidité. Le grip est encore amélioré en 1981 avec le Ultra Pebble design, le fameux aspect granuleux des balles modernes.

En 1956 la NFL stoppe l’usage des ballons blancs pour les matchs en soirée, car la peinture rend la balle glissante. Cependant, ils conserveront deux bandes blanches aux extrémités jusqu’en 1976. Ces bandes, toujours présentes en NCAA pour faciliter la localisation du ballon dans les airs, sont devenues caractéristiques des balles universitaires.

Les lacets, qui servaient à permettre de gonfler la balle jusqu’en 1920, sont remplacés au début des années 80 par des bandes de polyvinyl chloride extrudé qui sont le point d’appui essentiel pour former les spirales des passes.

Le ballon actuellement

A part d’un point de vue technologique, le ballon de football n’a plus évolué dans ses dimensions depuis les années 30. Il mesure 28cm de long, 72 centimètres de circonférence dans son grand axe, et 54 centimètres de circonférence dans son petit axe. Il est gonflé à 0,9 bar environ et pèse un peu plus de 400 grammes.

Pour les rencontres, chaque équipe de la NFL dispose de 48 ballons qui sont adressés à l’équipe qui reçoit le match. 6 à 12 d’entre eux ne sont destinés qu’au jeu au pied. Ces balles spécifiques sont livrées en container scellé marqué d’un K qui ne peut être ouvert que par les arbitres. Ceux-ci amènent un nouveau ballon pour chaque coup de pied ou dégagement afin que les botteurs ne puissent pas s’habituer à une balle particulière.

Sources : www.bleacherreport.com, www.popularmechanics.com, www.remembertheafl.com, SB Nation, Wikipedia,

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