[Portrait] George Kittle sur la route de Madison

Son jeu et sa personnalité ne laissent personne indifférent, rencontre avec George Kittle.

George Kittle

Né le 9 octobre 1993 à Madison, Wisconsin
1m93 pour 115 kilos
San Francisco 49ers, tight-end, 4e saison

Une maturité tardive

Depuis que Kirk Ferentz en est devenu l’entraineur, l’université de Iowa est réputée pour la formation des linemen offensifs et aussi celle des tight-ends, à commencer par Dallas Clark (l’ancien meilleur ami de Peyton Manning) jusqu’à Noah Fant (Broncos) et TJ Hockenson (Lions). Son fils, Brian Ferentz, a été entraineur des tight-ends en NFL et pas de n’importe lesquels : Rob Gronkowski et Aaron Hernandez avec les Patriots en 2011.

Pour son cursus universitaire, George Kittle semble donc se trouver au meilleur endroit possible. Après deux saisons où il est peu utilisé, 2015 lui offre davantage d’opportunités de montrer son talent sur le terrain. Mais s’il inscrit 6 touchdowns, les ballons arrivent le plus souvent vers un autre receveur rapproché : le senior Henry Krieger-Coble. Son propre cousin !

Pire, lors du dernier match de la saison, un de ces fameux et innombrables « Bowl Game », l’entraineur le laisse sur le banc, lui préférant un freshman pour jouer ce match de prestige.

« Je n’ai pas beaucoup joué mes trois premières saisons et c’est 100% ma faute ! Je suis allé au lycée à Iowa City, j’y avais beaucoup d’amis alors quand j’ai rejoint l’université, je n’étais pas à 100% sur le football, c’était plutôt fête après fête. », George Kittle en conférence de presse avant le Super Bowl 54

Le printemps suivant vient l’heure du Spring Game : match annuel où chaque université anticipe le camp à venir en organisant une opposition entre les 90 joueurs que composent un effectif en NCAA. Ce jour-là, bien que qualifié de « match amical » entre coéquipiers, George Kittle distribue les pancakes sur chacun de ses blocs pour la course. Certains joueurs en défense viennent le lui reprocher mais il n’en a que faire. Il est déterminé. 2016 sera son année. Conseillé par Pat Angerer, un ancien linebacker de Iowa (et des Colts en NFL), il va changer d’attitude.

Tonton Jon et mon gars sûr CJ

En 2016, malgré son appétit et son sérieux, il ne capte pourtant que 22 passes pour 314 yards. 4 Touchdowns. Pas de quoi affoler les recruteurs NFL. Il suffit pourtant d’une personne et cette personne a existé pour George Kittle.

Jon Embree est l’entraineur des tight-ends chez les 49ers de San Francisco. Et il connait une chose ou deux sur ce poste après avoir été l’entraineur de position du Hall of Famer Tony Gonzalez pendant trois saisons avec les Chiefs. Jon Embree a aussi occupé une saison le même poste avec les Browns de Cleveland : la saison 2013 où Jordan Cameron a produit pour 917 yards et 7 touchdowns le conduisant au ProBowl en clôture de saison.

Jon Embree apprécie ce qu’il voit de George Kittle. Rapporté par Michael Silver du site de la NFL, lorsque l’entraineur des quarterbacks s’est rendu sur le campus de Iowa pour y observer CJ Beathard, Kyle Shanahan aurait demandé à Rich Scangarello d’avoir aussi un œil sur ce tight-end dont Jon Embree n’arrête pas de parler. Les deux joueurs seront au final sélectionnés par la franchise de San Francisco quelques mois plus tard.

Sélectionné au 5e tour, sa première saison n’est pas une franche réussite : 43 réceptions (sur 52 dites attrapables) pour 515 yards et deux touchdowns. Et surtout 7 drops ! Il relâche une réception sur six ! Trop pour les standards NFL. En tant que bloqueur par contre, en protection de passe ou pour aider le jeu de course, il est rarement battu. Oui mais un tight-end bloqueur exclusif ne dure pas longtemps en NFL, très vite il est remplacé par un autre. S’il veut durer, George Kittle va devoir améliorer sa fiabilité en réception.

C’est là qu’intervient son ancien quarterback à l’université de Iowa et toujours coéquipier puisque jouant désormais avec les 49ers : Casey Jarrett Beathard. Passant tous deux l’intersaison dans le Tennessee, ils décident de travailler ensemble. Et de travailler dur. Déjà, lors des meetings à Iowa, CJ Beathard donnait sa vision éclairée des défenses et de comment les battre à son ami. Les deux vivaient dans la même chambre universitaire, ils se connaissent bien, se respectent et font ce qu’il faut pour s’entraider. Et le travail paye dit-on.

« Sa première saison était mi figue mi-raisin mais ensuite il a fait ce qu’il faut pour progresser en travaillant dur et en restant concentré sur le football. », John Lynch, manager des 49ers, pour nfl.com

Cette seconde saison avec les 49ers, il bat le record de yards en réception par un tight-end avec 1377. Sa troisième ? Il joue le SuperBowl !

Rien que ça.

De quoi lui permettre de signer un contrat faisant de lui le tight-end le mieux payé de la ligue. Désormais tous les amateurs de football connaissent ce tight-end et son passé récent. Alors revenons un peu plus en arrière.

Né un jour de match

C’est un samedi que Jan Krieger-Kittle perd les eaux. Elle est sur le point d’accoucher alors son mari Bruce l’installe en voiture en direction de l’hôpital de l’université de Wisconsin. Ses contractions sont de plus en plus rapprochées, il faut faire vite. Oui mais on est samedi. Et l’équipe de football de l’université de Wisconsin reçoit Northwestern ce jour-là. Les Badgers du Wisconsin jouent devant une affluence moyenne de 75 000 spectateurs, on vous laisse imaginer les troubles à la circulation que cela peut causer. Bruce Kittle double à gauche, à droite, il tente coute que coute de rejoindre l’hôpital qui jouxte le stade, en dépassant des fans en mode festif.

Arrivé à temps, George Kittle né le 9 octobre 1993 sous les vivas de la foule. Une foule, visible depuis les fenêtres de la maternité, acclamant la victoire de leurs favoris 53 à 14. Dans un stade que le jeune George a ensuite beaucoup fréquenté.

« Je n’avais que six ans ce jour-là mais je me souviens encore de Ron Dayne gagnant 216 yards au sol contre Iowa, c’était mon joueur préféré. », George Kittle pour Hawk Central

C’est peu dire que George Kittle aurait aimé jouer dans ce stade, pour cette université dont il a vu tant de matchs depuis les tribunes. Wisconsin ne lui fera aucune offre de bourse. Pas plus qu’Iowa d’ailleurs. Seul le modeste programme de Weber State en deuxième division le recrute. Ce receveur listé par 247Sports comme le 1535e joueur du pays s’apprête donc à affronter les terrifiants Vandals de Idaho et les redoutées Vikings de Portland State ! Au moins, cette conférence de seconde zone a un nom cool : Big Sky Conference.

C’était sans compter sur un coup de pouce du destin : le dernier jour des signatures, deux joueurs font faux-bond à Iowa en s’engageant finalement avec une autre université. Kirk Ferentz téléphone alors au domicile des Kittle. L’offre est valable 15 minutes, ensuite il appellera un autre joueur. Pas besoin de tant, une minute plus tard George Kittle était un Hawkeye de Iowa. Une bourse pour jouer au football, son cousin dans l’équipe de football, sa soeur dans l’équipe de volleyball et puis, hormis une année passée dans l’Oklahoma, ses années lycée se sont déroulées dans l’Iowa. C’est juste parfait. Surtout que Bruce, son père, a lui aussi joué pour l’université de Iowa en tant que lineman offensif. La belle histoire « à l’Américaine » en somme.

Manque plus que le final. Hollywood les aime émouvants car forts en symbole.

Le 3 Octobre 2015, George Kittle, maillot d’Iowa sur les épaules, affronte Wisconsin dans ce Camp Randall Stadium, théâtre de bien de ses souvenirs d’enfance. Dans un match digne des combats de la conférence Big Ten, Iowa s’impose 10 à 6. George Kittle n’y capte qu’une passe. Pour un gain d’un seul yard.

Mais ce yard donne le seul touchdown du match !

(21e seconde ci-dessous)

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