[Globetrotteurs] Cairo Santos : au nom du père

Des passeports étrangers ou des parents expatriés. S’il sont tous nés à des milliers de kilomètres des États-Unis, ils ont tous fini par atterrir sur les rectangles verts de la NFL. Voici leur histoire.

Il devait parfaire un anglais faiblard, il s’est découvert une passion insoupçonnée. De son Brésil natal, obsédé par le ballon rond, à sa Floride d’adoption, terre d’opportunités, Cairo Santos s’est bâti un destin hors du commun pour un Brésilien. Un destin oval.

Fútbol vs Football

Une ville millénaire et le club du Roi Pelé en guise de blases. Fiston d’un pilote de ligne ancien champion de squash dans ses jeunes années reconverti en acrobate du ciel, Cairo voit le jour à São Paulo, mais grandit à Brasilia, jamais très loin de Talita, son aînée d’un an à peine. Et jamais très loin d’un ballon rond, prédispositions géographiques et génétiques obligent.

« J’étais tellement obsédé par le football, » confie-t-il à la BBC en octobre 2015. « Je rêvais de jouer pour le Brésil un jour, porter ce maillot. […] Chaque fois que la Seleção jouait à Brasilia, j’allais au stade. Chaque année, j’achetais le maillot de Flamengo, du Brésil et même celui de Chelsea. »

À la maison, dans le jardin, un maillot des Cariocas de Flamengo plutôt que des Paulistes de Santos sur le dos, le gamin a toujours un ballon aimanté au bout de ses orteils. Et quand il l’expédie pour la « millième fois » dans le jardin d’à côté, il demande timidement à sa soeur d’aller le demander à des voisins à bout de nerfs. Amoureux du sourire plein de dents de Ronaldinho et de ses géniales inspirations, il aime très tôt cavaler au coeur du jeu. Un milieu de terrain chétif, mais technique par qui tout passe. Le chef d’orchestre. Le métronome. Seulement, au Brésil, ils sont des milliers de gamins dégoulinants de talent par tous les pores à partager le même rêve auriverde. Celui de la Seleção. Aussi, à 15 piges, il décide de partir un an en échange aux States avec un plan de match bien défini dans le ciboulot.

« Au Brésil, la compétition est tellement relevée que c’est extrêmement dur de réussir. Mon plan était de partir étudier là-bas, d’apprendre l’anglais et de voir si je pouvais éventuellement trouver un moyen de rester aux États-Unis en jouant au football. »

Gringalet encore imberbe, Cairo laisse derrière lui son quartier cossu chargé de souvenirs et s’envole pour un échange scolaire d’un an à St. Augustine, petite station balnéaire à 40 bornes au sud de Jacksonville, Floride. Une ville blindée d’histoire considérée comme le premier lieu d’accostage européen lorsque Juan Ponce de León et ses hommes y débarquent en 1513. Il faudra attendre un demi-siècle pour que les Espagnols s’y établissent durablement sous l’impulsion de Pedro Menéndez de Avilés et fondent ce qui deviendra la plus ancienne ville continuellement occupée par les Européens sur le territoire de ce qui accouchera quelques siècles plus tard des États-Unis d’Amérique. Un concentré d’histoire bordé par les plages de l’Atlantique et à l’architecture si singulière, mélange de styles coloniaux espagnols, français et britanniques, mais aussi de style Renaissance typique de la péninsule ibérique et aux incontestables inspirations mauresques. Talita, abandonnée par son toujours bienveillant complice, mettra une semaine à sécher ses larmes.

En Floride, Cairo débarque dans une famille dont il n’a appris le nom qu’une semaine plus tôt. Dans l’urgence. David et Kathy Burnett n’ont pas eu le temps de signer le moindre papier du programme d’échange. Un coup de fil du lycée a suffi : « Nous avons un gamin brésilien pour lequel nous n’avons pas réussi à trouver de famille. » Le couple se regarde, n’hésite pas longtemps et accepte de l’accueillir chez lui. Les premières semaines sont intimidantes pour cet ado réservé parachuté dans le quotidien de gens qu’il ne connait pas et qui parlent une langue qu’il baragouine à peine. 

« C’était un gamin sacrément courageux pour quitter sa famille et son pays pour venir jusqu’ici. Et il ne s’est pas contenté de s’y intégrer bêtement, il l’a fait avec panache, » se souvient David, admiratif, sur le site officiel des Chiefs. « Il a toujours eu cette faculté à affronter les choses telles qu’elles se présentent. Je pense que c’est aussi ce qui fait de lui un aussi bon botteur, cette capacité à gérer la pression. »

Entre émotions, stress et appréhension, les premiers jours sont pourtant pénibles. Même la pizza d’accueil à peine descendu de l’avion a du mal à passer. Son estomac a déjà le blues des plats concoctés par Magalie, sa mãe. Cairo a beau ânonner quelques mots d’anglais, son accent à couper au couteau complique terriblement la communication. Notamment avec Tyler, le fils unique du couple. Mais l’ado ne se démonte pas et, entre deux sessions Skype revitalisantes avec sa soeur et ses parents, il s’adapte jour après jour à cette nouvelle langue, ce nouvel environnement, cette nouvelle culture et cette nouvelle famille. À 15 ans, sans en avoir pleinement conscience, c’est une nouvelle vie qui débute pour lui.

« C’est une expérience vraiment stressante au début : débarquer dans la maison de gens que vous ne connaissez pas, » se souvient l’expat. « Il y a cette appréhension, ‘Est-ce que le courant va passer ? Est-ce que je vais les comprendre ?’ Mon anglais n’était pas terrible et ça m’a bien pris deux mois pour faire ma place et me sentir chez moi. »

Timide, il tape nonchalamment dans un vieux ballon de foot cet après-midi là, tout seul, à l’écart, pendant qu’à l’autre bout du petit bout de gazon qui trône devant la maison des Burnetts, les autres ados s’époumonent sous un panier de basket. Du coin de l’oeil, les jongles et virgules de son invité brésilien n’ont pas échappé à Tyler. Intrigué, il lui propose d’essayer de frapper dans un ballon de football made in US. Pour voir. Le plus loin possible. Le Ricain, tee improvisé, s’aplatît à plat ventre sur l’asphalte et maintient la balle ovale en équilibre sur le bitume fumant. « J’ai pris deux pas d’élan et j’ai frappé aussi fort que je pouvais, » se souvient Cairo. La sensation est plaisante. Elle rappelle presque celle d’un ballon de soccer. Trajectoire tendue, direction rectiligne, le cuir décolle pour aller s’écraser plus de 50 yards plus loin. En un coup de pied anodin pour ce gamin naturellement aimanté par les ballons depuis ses tout premiers pas, le Brésilien vient de changer le cours de sa vie. Tyler, lui, vient d’hériter d’un nouveau frangin. Mais ça, les deux ados ne le savent pas encore.

« Quand je me remémore cet épisode, ça me fait sourire, » raconte Cairo à la BBC. « Ça a été un immense virage dans ma vie. C’est comme si j’avais rencontré l’amour de ma vie ce jour-là. »

Pourtant dans le plan savamment mûri qu’il s’était ficelé, il n’était aucunement question de ce sport de golgoths en armures qu’il avait vus se rentrer dedans deux ou trois fois à la télévision. Il n’a jamais été bâti pour jouer à un truc pareil. Il se blesserait au moindre contact. Toute son énergie et son attention étaient rivées sur un fútbol où le cardio l’emporte souvent sur l’impact physique. Jusqu’à ce jour où tout a déraillé.  « Un coup de pied sur le béton, » s’amuse rétrospectivement Tyler sur la page officielle des Chiefs. Intrigué par ce premier contact, Cairo est pourtant loin d’être encore décidé à franchir le pas pour de bon et troquer ses amples shorts pour un justaucorps et un plastron. Son objectif numéro un est toujours d’intégrer le onze de la St. Joseph Academy Catholic High School. Il faut que ses potes ricains lui assurent parole de louveteau que le kicker n’entre sur le terrain que pour taper dans le ballon et retourner rapidement se mettre au chaud sur le bord du terrain sans une égratignure pour que le Brésilien consente à faire un essai avec les autres footeux. Ça, et les encouragements d’un père qui entrevoit dans ce sport des perspectives bien plus nombreuses et réalistes que dans un soccer aussi bouché que le péage de St Arnoult un 14 juillet.

« Tu es Brésilien, tu tapes dans un ballon depuis que tu as deux ans, je pense que tu as plus de chances de te faire remarquer ici, alors tu devrais te lancer dans le football, » lui lâche son padre. 

Trois pas en arrière, deux sur le côté, la tête baissée, les yeux rivés sur la gonfle. Une fois les instructions de base passées, son talent éclabousse vite à la face du staff des Flashes. Il ne lui faut que quelques jours pour enfiler officiellement son casque vert et noir. Quelques semaines plus tard, à mesure qu’il se familiarise avec cette nouvelle mécanique presque robotique, il balance des taloches de plus de 55 yards qui feraient pâlir plus d’un pro. Pour des oreilles qui peinent encore à apprivoiser leur nouvelle langue, les appels de jeux et audibles qui fusent sur le terrain résonnent comme du chinois. Mais l’ado ne lâche pas et prend plaisir à être malmené par ces nouvelles responsabilités, malgré les question existentielles qui le turlupinent. Pourquoi enfiler un casque pour taper dans un ballon ?

« J’avais l’impression de frapper un coup franc ou un penalty, de marquer un point et d’aider mon équipe à gagner, » explique le natif de Limeira. « J’adorais ça. »

Sous le charme d’un sport dont il est encore loin de piger toutes les subtilités, il claque quelques billets verts sur le jeu Madden. Manette en main, il fait chauffer sa Xbox et, aux commandes des Colts de son nouveau chouchou Adam Vinatieri, enchaîne les parties virtuelles comme autant de cours intensifs pour combler le fossé qui le sépare de ses nouveaux coéquipiers. « C’est comme ça que j’ai appris les règles, les positions et les joueurs, » rigole-t-il sur chiefs.com. Soudainement, vissé sur son canap, il se met à caresser des rêves casqués qui rendent ses fantasmes pas si lointains de Seleção presque absurdes. Ce qui se trame sur l’écran planté à quelques mètres de lui semble si réel, si palpable, si atteignable. Plus que ses lubies de fútbol qui auront guidé toute sa jeunesse. Il accepte une vérité que, jusque-là, il refusait de s’avouer : il ne veut pas juste être footballeur, il veut être un athlète professionnel. Peu importe le sport. Peu importe le ballon. Cairo empoigne alors sa machette de pionnier et, acte inconcevable pour un Brésilien, renonce définitivement à ses rêves de soccer pour embrasser ce ballon brun flanqué d’un lacet blanc.

Deux pays, deux familles

Plusieurs mois se sont écoulés, Cairo Santos s’épanouie dans sa nouvelle vie et son nouveau dada. À tel point qu’il avoue à ses parents de substitution son intention de rester aux États-Unis deux années de plus, le temps de finir le lycée. Venu apprendre l’anglais pendant un an, il rempile pour deux années supplémentaires à cause d’une histoire de ballon. Ou plutôt grâce. La chambre d’amis qu’il occupe devient définitivement la sienne. Ses rêves de NFL deviennent ceux de toute la famille. Tyler devient le frère qu’il n’a jamais eu au Brésil. L’expat s’est trouvé une nouvelle famille qui l’aime comme s’il avait toujours été des leurs. Pour le pieu Cairo, un cadeau du ciel. Tous les dimanches, Kathy consent même à faire les deux heures aller-retour de bagnole pour emmener son fils adoptif à son entraînement particulier de dégommage de ballons ovales.

« C’est le genre de choses auxquelles du t’attends de la part de ta mère, pas de quelqu’un qui t’as accueilli comme étudiant étranger en échange. Ils ont été de véritables parents pour moi, » raconte un Cairo nostalgique et reconnaissant. 

Encouragé par ses deux familles, le botteur décroche une bourse d’études de l’Université de Tulane, à La Nouvelle-Orléans. Pas le programme le plus prestigieux, mais la FBS quand même, la crème de la crème du football du samedi. Au bout de la Vague Verte, sur la plage écumeuse, la NFL lui tend les bras. Cairo vit un rêve éveillé. Jusqu’à ce dimanche 15 septembre 2013. Le téléphone sonne. Rien d’anormal, le traditionnel coup de fil dominical. À l’autre bout de la ligne, à plus de 7000 bornes de là, sa mère, des trémolos dans la voix. « J’ai une terrible nouvelle. » Son père vient de se trouver la mort aux commandes de son avion, en pleine séance de cabrioles aériennes. La pire épreuve qu’il n’ait jamais eu à affronter : « Mon corps était là, mais ma tête était au Brésil. » Il y a à peine quelques semaines de cela, en juin, il était avec lui. Au Maracana de Rio De Janeiro, entre père et fils, pour admirer leur Brésil et l’Angleterre de son idole Frank Lampard se neutraliser 2-2. Un souvenir si proche et déjà si lointain. Avertis du drame, David et Kathy le rejoignent immédiatement à NOLA. Il ne fermera pas l’oeil de la nuit. Le lendemain, ses coachs sont informés et un accord est trouvé avec la NCAA pour qu’il puisse rentrer au pays.

Le mardi suivant, Cairo assiste aux funérailles brésiliennes de son père. Le jeudi, au téléphone, ses coachs lui soufflent de rester le temps qu’il voudra. Le temps qu’il faudra. « Je veux jouer, » leur réplique-t-il. « Rentrer et faire ce que mon père m’a toujours dit de faire. » Le vendredi, il est dans un avion pour New York. Le samedi, le kicker est en uniforme sous le dôme de Syracuse. Son premier field goal fait mouche. Le 26e de suite. À 4 unités du record NCAA. Le second, lui, va s’écraser contre les barbelés de chaire et d’os dressés par les Oranges. Fin de série. Sept jours plus tard, il catapulte un boulet de 56 yards entre les perches face à UL Monroe avant d’offrir la gagne à 5 secondes du terme contre North Texas la semaine suivante. Le samedi d’après, sous la voute du Mercedes-Benz Superdome de La Nouvelle-Orléans, au bout de la 3e période d’interminables prolongations, il délivre les siens de 42 yards. Imperturbable malgré le drame qui le hante.

« Je me souviens de l’émotion qui m’a envahi après chacun de ces coups de pied, » raconte-t-il sur chiefs.com. « Ça m’a permis d’entrapercevoir la lumière à nouveau, ça m’a donné envie de continuer à jouer, de ne pas abandonner. Au final, je garde un souvenir positif de cette période. »

Une thérapie par le sport. Loin des siens, il vit son deuil en solitaire. Pour tenir le coup, il tape des gonfles à s’en péter le pied. Le ballon, les poteaux jaunes et rien d’autre. Si ce n’est son autre famille. Une famille qu’il ne quitte plus. Jours fériés, vacances d’été, break hivernal ou printanier, tous les prétextes sont bons pour retrouver ce bout de Floride si rassurant. « Il n’est jamais parti pour être honnête. […] On le considère comme un de nos enfants, » confesse son père américain. Et quand il a plusieurs semaines devant lui, Santos décolle direction le Brésil et les deux (autres) femmes de sa vie pour renouer avec ses souvenirs d’enfance.

Junior, Santos finit l’année en beauté en enchaînant 21 fields goals, loin du record universitaire de 30 à l’époque, détenu par Brandon Sherrod de Yale, et s’invite sur l’équipe All-American. Après 4 ans sur le campus de Tulane, auréolé du Lou Groza Award récompensant le meilleur kicker universitaire en 2012, il quitte le Green Wave avec le meilleur pourcentage de réussite de l’histoire du programme et estampillé meilleur botteur NCAA. Le meilleur de toute la cuvée 2014, à n’en pas douter. Porté par le pied droit surpuissant de son brasiliense, Tulane renoue enfin avec un Bowl après 11 années de disette. À quelques semaines de la draft, il espère marcher dans les pas de son pote kicker Caleb Sturgis, natif de St. Augustine repêché au 5e tour par les Dolphins un an plus tôt.

Brasiliense et résilience

Jamais son nom ne sera prononcé. À l’inverse de ceux de Zach Hocker et Nate Freese, dans l’anonymat du 7e tour. Deux noms vite retombés dans l’oubli. Non-drafté au printemps 2014, son brillant CV universitaire ne passe pas inaperçu pour autant et il est signé comme agent libre par les Chiefs. À 22 ans, il devient le premier Brésilien dans l’histoire de la NFL. Une touche d’exotisme au confluent des rivières Missouri et Kansas. Quelques semaines après avoir paraphé son contrat à minima, Talita et sa mère s’offrent une escapade américaine pour venir l’aider à déménager. Toujours aussi tendu malgré les années, il a peur d’emmener trop de vêtements dans ses valises se souvient sa soeur aînée. « Je ne serais là-bas que pour quelques mois. » Mais Magalie, en bonne mère poule sûre que son fils passera les cuts estivaux, s’est informée de la météo hivernale dans le Missouri et il est hors de question que son fiston attrape froid. Une semaine plus tard, armé de sa pile de valises, il regarde piteusement les autres recrues et leur bagage unique. Il se sent ridicule.

Dès les premiers entraînements volontaires et tout au long du camp d’été, Cairo, gringalet d’un mètre 75 et 73 kilos tout mouillé, se frotte à Ryan Succop et ses 5 années d’expérience. Deux hommes, un poste. Et c’est le petit Brésilien et ses joues rouges de timidité qui va décrocher le job. « Mon petit frère est un joueur NFL. » Quand elle apprend la nouvelle, Talita fond en larmes. Une immense fierté.

« Il a sa propre page Wikipédia, » blague-t-elle sur le site officiel de KC. « Je peux pas croire que mon petit frère ait sa page Wikipédia. »

Son père adoptif aussi ne peut pas échapper au ras-de-marée lacrymal avant de s’emparer de son portable pour spammer l’ensemble de son répertoire, transporté par la joie. Il est le premier à acheter un maillot rouge floqué du numéro 5. Un pour lui et un pour Tyler. Un maillot qu’il portera religieusement tous les jours de match. Chaque fois que son fiston entre sur le terrain, en tête-à-tête avec les poteaux jaunes, il bondit de son fauteuil et se mord les doigts, nerveux comme jamais. Même à São Paulo et Brasilia on se met soudainement à parler de cet autre football.

« Tout le monde est dingue là-bas, » confie Cairo au Kansas City Star en septembre 2014. « En entrant sur le terrain, je deviendrai le tout premier Brésilien à jouer dans la NFL et les gens là-bas sont excités comme tout. Le football est en pleine expansion au Brésil, donc c’est un honneur de représenter mon pays et pouvoir prendre part à cet essor. »

En semaine 1, pour son dépucelage, Cairo doit se contenter d’un 50% de réussite sur ses deux tentatives et les Chiefs s’inclinent face au sans-faute et 14 points de… Ryan Succop, nouveau botteur des Titans après avoir été poussé vers la sortie par le petit nouveau. Pour lui faire de la place sur le roster, Tennessee s’est délesté une semaine plus tôt de Maikon Bonani, natif de… São Paulo qui n’aura jamais la chance de fouler un terrain NFL en saison régulière et devenir le pionnier des siens. Ironie quand tu nous tiens.

Les milliers de kilomètres parcourus. Le parachutage dans une famille dont il ignorait tout. La découverte d’un sport dont il a tout appris manette en main. Alors que Cairo prend la mesure du chemin parcouru, plus que toutes ces épreuves, c’est son père qui accapare ses pensées. Il aurait été si fier de lui.

« Il a toujours été mon plus grand fan, il a toujours pris un plaisir fou à me suivre, » confie le kicker des Chiefs. « Nous avions déjà anticipé la possibilité d’une carrière, prévu que mes parents déménagent ici pour pouvoir me suivre de plus près. C’est triste. C’est dur de ne pas pouvoir partager tous ces moments de fierté et de bonheur avec une personne que j’ai admiré toute ma vie. Tout ça, je le fais pour lui. Tous les jours, je travaille pour être capable d’aider ma famille, aider ma mère et pouvoir l’aider à s’installer ici un jour. Ce sont mes deux raisons d’être : ma mère et ma soeur. »

113. Jamais un rookie n’avait empilé autant de points dans la riche histoire des Chiefs. Pas même la légende norvégienne Jan Stenerud. À chaque frappe qui fait mouche, il tend les doigts vers le ciel. Vers son père. L’année suivante, en semaine 4, Cairo enfile 7 field goals en une partie, dont deux de plus de 50, et passe à deux doigts d’égaler les 8 coups de pied records de Rob Bironas en octobre 2007. Battus par les Bengals (21-36), il sera le seul Chief à inscrire des points ce jour-là. En novembre 2015, le coeur battant, il découvre Wembley, théâtre de bien des exploits des Blues. Pour cet amoureux de Chelsea, un moment particulier.

La plus longue tatane de sa carrière face aux Texans (54 yards), le coup de pied de la gagne sur le gong face aux Panthers, un poteau rentrant victorieux à 5 secondes de la fin de la prolongation à Denver, AFC Special Teams Player of the Month d’un mois de novembre impeccable. Après une saison 2016 bien remplie, la campagne suivante démarre au ralenti à cause d’une blessure à l’aine. Au ralenti, mais à l’heure. En uniforme pour l’ouverture de la saison à Foxboro, il participe au feu d’artifice en passant ses 6 conversions dans une orgie offensive mémorable. Deux semaines plus tard pourtant, un mauvais coup réveille sa blessure et Cairo est envoyé sur une réserve des blessés dont il est rapidement expulsé. Waived. Réclamé par les Bears, il retrouve l’IR dès la semaine 13 après une énième alerte à l’aine lors de l’échauffement.

Une escale estivale à bord d’un Jet new-yorkais visiblement pas convaincu, une pige de deux semaines à L.A. pendant que Greg « The Leg » Zuerlein se remet d’un pépin… à l’aine, de rapides retrouvailles floridiennes quand les Bucs coupent Chandler Catanzaro en novembre, puis Ryan Succop, encore. Orphelins de leur kicker, envoyé prématurément sur la réserve des blessés, les Titans misent sur Cairo Santos. Irréprochable pour sa première, il se foire magistralement en semaine 5 lorsqu’il manque la cible 4 fois et rate la mire sur une conversion. La sentence est immédiate : le lendemain, le Brésilien pointe au chômage. Signé par les Bears fin août dernier, pour mieux être coupé quelques jours plus tard, envoyé sur le practice squad le lendemain, il est finalement promu titulaire la veille du début de la saison à Detroit quand Eddy Piñeiro se blesse et est out pour la saison. Impeccable à courte distance, fiable de loin, il pointe aux portes du top 10 avec un joli 91,3% de réussite. À même pas 30 piges, après trois saisons sur respirateur artificiel, sa carrière retrouve de l’allant.

Son anglais soigneusement perfectionné, il aurait dû plier bagages au bout d’un an. 14 ans après son épiphanie asphaltée, il est toujours là, à écumer les terrains de la NFL, en quête de régularité. Tout ça grâce à un ballon difforme et un peu de bitume.

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