Tableau noir : Evan Mathis

A Philadelphie, c’est peu dire que rien ne s’est passé comme prévu cette saison. L’un des rares motifs de satisfaction vient du guard gauche Evan Mathis. Dans une ligne décimée...

A Philadelphie, c’est peu dire que rien ne s’est passé comme prévu cette saison. L’un des rares motifs de satisfaction vient du guard gauche Evan Mathis. Dans une ligne décimée par les blessures, il est le seul parmi les cinq de départ encore debout, et en dépit du marasme offensif des Eagles, Mathis joue à un niveau All-Pro.

Evan Mathis est actuellement premier au classement PFF des guards avec presque le double de points de Marshal Yanda, des Ravens. Il n’a pas autorisé le moindre sack cette saison, et se montre au top dans le jeu au sol. Beaucoup de guards NFL se reposent sur leur force brute, et peu disposent de la technique de Mathis, qui parvient très souvent à se place entre son homme et le ballon, même lorsque son rôle est secondaire sur un jeu. PFF a joint Evan Mathis pour lui parler de son match contre les Cowboys, et aller plus en détail dans l’analyse du jeu intérieur dans la ligne. Un sujet qui passe souvent à la trappe quand on parle football.

Crédit texte et image Pro Football Focus.

Eagles @ Cowboys – 1er quart-temps, 12:28 à jouer – Enrayer la force adverse

Même si la course est destinée à partir sur la droite, il est essentiel de couper l’angle de poursuite des hommes de ligne défensifs pour ouvrir un trou au coureur. Sur ce jeu, Evan Mathis doit se mettre en face d’un gros DT pour stopper sa progression et débloquer un tracé de course.

« J’ai la tâche de bloquer un défenseur qui est plus proche du point d’attaque de mon coureur que moi. Je peux gratter un quart de seconde sur le snap, et un autre en me décalant vers l’arrière et la droite. Coach Howard Mudd appelle ça ‘perdre du terrain pour gagner la position préférentielle’. C’est très fréquent sur les schémas de block en zone. Il faut que ce premier pas soit assez rapide pour pouvoir me placer dans l’angle du jeu du défenseur, entre lui et le ballon », explique Mathis.

« Mon second pas place le défenseur dans la ligne de mire. C’est de la force pure et simple, pour stopper net le DT, réduire sa force au contact, et le contraindre à bouger latéralement. Idéalement, les contacts en force sont réalisés avec l’épaule et/ou les avants bras. Si je parviens à gagner la position préférentielle sur le premier contact, je peux dépasser la force de mon adversaire et me placer entre lui et le ballon, quoi qu’il fasse. Si je n’y parviens pas, c’est un combat pur et dur pour venir se placer et le repousser. »

Sur l’image, on constate que Mathis s’est placé à la perfection grâce à sa technique, et peut ensuite laisser parler sa force pour bouger le DT, le faire tomber, et le mettre hors du champ. « C’est drôle de dominer son block au point de mettre son vis-à-vis sur le dos. C’est moins drôle quand le défenseur trébuche et tombe tout seul. Sur ce jeu, ce n’est pas moi qui l’ai mis à terre. Il s’est juste pris les pieds dans jambes de girafe de mon tackle gauche. » Mathis ne peut pas s’octroyer le pancake, mais tout ce qu’il fait sur ce jeu correspond point pour point au schéma dessiné sur son playbook : neutraliser la première menace contre la course.

Eagles @ Cowboys – 1er quart-temps, 5:44 à jouer – Atteindre son block

Là, c’est l’une des choses les plus dures à réaliser pour un guard, et pourtant l’une des plus routinières de son job. Du coup, on commente rarement ce travail, pourtant essentiel dans le jeu au sol. En direct, les commentateurs Al Michaels et Cris Collinsworth ont tressé des louanges au left tackle qui a neutralisé DeMarcus Ware. C’est une fois le ralenti passé que Collinsworth a souligné l’importance du block de Evan Mathis, car c’est lui qui ouvre la porte au coureur des Eagles.

Dans cette situation, les hommes de ligne ont souvent tendance à se contenter du mouvement latéral, c’est à dire initier le contact sur le défenseur et le bouger vers le côté, en laissant au coureur le soin de choisir son trou à attaquer. Ici, après le premier contact, Mathis réussit encore en technique à sceller le défenseur à l’intérieur grâce à son positionnement. « Mon déplacement et mon premier contact sont tellement bons que le défenseur tente de la jouer sur mon épaule extérieure pour arrêter la course, mais à ce moment là, Bryce Brown entre dans le trou tellement vite qu’il trouve la voie entre le DT et le OLB pour filer direct dans l’endzone. »

Si Mathis s’était contente de prendre une bonne position et de bouger son homme sur le côté, il l’aurait placer sur le chemin de son coureur, le forçant ainsi à planter un cutback intérieur qui l’aurait amené vers d’autres Cowboys. C’est la qualité de son placement qui lui permet de neutraliser complètement le défenseur, et qui donne à Brown une réelle chance de marquer.

Eagles @ Cowboys – 2ème quart-temps, 9:17 à jouer – Les petits détails

Ce jeu illustre ce qui sépare Evan Mathis de la majorité des autres guards NFL. La course doit partir en bout de ligne à droite, très loin de la position initiale du guard gauche. A priori, l’influence qu’il aura sur ce jeu sera minimale. Mais l’exécution de assignation, comme s’il s’agissait d’un block clé pour le jeu, finira par avoir un impact sur la course. « Si l’on fait des stats sur les courses à droite, alors les tackle et guard à droite serait soit à féliciter soit à montre du doigt. En réalité, la plupart de ces courses sont stoppées par un défenseur qui vient de l’autre côté de la formation à cause d’un block mal réalisé. Chaque block à son importance, peu importe où il doit être fait. »

Evan Mathis doit ici atteindre le second niveau de la défense de Dallas, et couper la poursuite intérieure du linebacker du milieu, Ernie Sims. Une tâche facilitée par le placement des deux OLB, qui sont collés à la ligne de scrimmage en position de blitz et se font rapidement cueillir par les Eagles. Mais ce qui arrive derrière est impressionnant.

Si vous regardez les hommes de ligne intérieurs travailler pour atteindre le second niveau, vous observez la plupart du temps qu’ils identifient leurs cibles et se mettent en travers de leur chemin, avec un cut block pour stopper la poursuite. Vous verrez rarement faire ce que Evan Mathis fait : engager, verrouiller, et sortir du jeu un défenseur.

La clé pour bloquer un linebacker, c’est la vitesse, explique Mathis : « J’ai moins besoin de force pour bloquer un LB qu’un DL, donc je m’attèle premièrement à être rapide. Je me dépêche d’être en position sur le défenseur puis je verrouille mes mains sur lui pour le pousser hors du jeu, à l’opposé du ballon ». Au lieu de simplement jouer le cut block, avec le risque de le rater, Mathis est actif dans l’approche de son assignation. Il anéantit purement et simplement toute menace pouvant provenir d’un joueur, et cela assure (en partie) à la course appelée d’atteindre au moins le second niveau de la défense.

Contre certains linebackers, c’est rarement un problème, mais Sims est rapide. Si Mathis ne le sort pas jeu, il représente encore une menace contre la course. Son bon travail met Sims au large, et au moment où le LB se défait du block, les Eagles ont déjà gagné 15 yards.

Les fans des Eagles peuvent au moins se consoler cette saison en se disant qu’ils tiennent l’un des meilleurs joueurs à son poste avec Evan Mathis. Philadelphie a fait le bon choix en sortant le chéquier pour garder cette pièce essentielle de la ligne, même si cette saison, c’est la dernière encore opérationnelle. Avec cinq hommes à 100% dont Mathis, les Eagles auraient peut-être pu espérer mieux.

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